La Haute Autorité de Santé (HAS) dont c’est l’une des missions* a agréé le 24 septembre la Banque Claude Bernard de Resip (Groupe Cegedim), le 10 décembre la base Vidal (groupe CMP Medica) et début 2009, Thériaque dans le cadre de la certification des logiciels d'aide à la prescription (LAP) en médecine ambulatoire. Thesorimed du GIE SIPS (financé par la CNAMTS) devrait être agréée fin mai. La charte d'agrément requiert des engagements d'exhaustivité, de structuration, de neutralité, d'exactitude et de mise à jour de l'information. Selon Étienne Caniard, président de la commission qualité et diffusion de l’information médicale de la HAS, on observe déjà un saut de qualité directement en rapport avec la procédure. La HAS apprécie en effet l’introduction dans les BDM (banque de données sur les médicaments) de l’information sur le service médical rendu (SMR), l’introduction de la créatinémie, du rappel de l’indication lors de la prescription et la possibilité de sécuriser l’ordonnance en DCI.
Les LAP utilisant une base agréée peuvent maintenant postuler à la certification de la HAS.
Le référentiel de certification des LAP a été adopté le 4 juin 2008 (voir Journal Officiel du 2 octobre 2008). Il comprend 74 critères qui devront être vérifiés (par essai) par l’organisme certificateur, SGS en l’occurrence. Objectif de la HAS : qualité et sécurité de la prescription, prescription au meilleur coût à qualité de traitement égal, facilitation du travail du prescripteur.
Ce que cela va changer pour le médecin prescripteur
Il ne s’agit plus seulement d’imprimer son ordonnance mais de la sécuriser. On ne se contente plus de faire jouer les interactions entre les médicaments. On prend en compte l’état du patient.
Ce qui exige que la BDM soit totalement intégrée avec les données du patient : administratives (nom, prénom, sexe, date de naissance) qui seront imprimées sur l’ordonnance et physiologiques (poids, taille, créatinémie pour adapter la posologie, grossesse, allaitement). Les états physiopathologiques, les antécédents, les intolérances et hypersensibilités aux substances actives et aux excipients sont enregistrés sous une forme structurée (en utilisant des dictionnaires). Ils serviront aux contrôles de sécurité. C’est donc en renseignant de façon structurée son dossier patient que le prescripteur fournit au LAP de quoi sécuriser la prescription. La structuration est aidée mais elle n’est pas automatique.
Les avantages d’un LAP certifié
Selon Étienne Caniard, la certification a de nombreux atouts :
- Elle augmente l’information disponible de référence pour le médecin : RCP, avis de la commission de transparence, fiches BUM (bon usage du médicament), SMR (service médical rendu), ASMR (amélioration du service médical rendu), TFR (tarif forfaitaire de responsabilité) des génériques.
- Elle participe à la qualité de la prescription (fonctions d’alerte sur les surdosages, contre-indications, intolérances)
- Elle respecte la liberté du prescripteur qui reste maître de sa prescription et utilise les fonctionnalités qu’il souhaite.
Au total, « l’utilisation adéquate de l’outil est à même de diminuer certaines erreurs de prescription : erreurs de posologie ou choix inadéquat du médicament. Selon les études, ces erreurs auraient pour origine un manque de connaissances sur le médicament, sur le patient ou une erreur de calcul. »
Une démarche volontaire
Un amendement de la loi HPST voulait rendre obligatoire l’usage des LAP mais il a été finalement écarté. Or les éditeurs de LAP sont unanimes sur ce point. Marilyne Minault, d’Imagine Éditions (Hellodoc) qui a fait partie du groupe de travail sur la certification, résume la situation : « Il n’y a pas de demande du terrain car pour le médecin c’est une contrainte. » Les éditeurs qui ont déjà intégré les bases de données dans leur logiciel le savent bien. Les LAP existant ont un nombre limité d’utilisateurs. Selon la HAS, seule la moitié des médecins impriment leur ordonnance ; sur cette moitié, 30 % sont abonnés à une BDM et 5 % codent pour structurer leur dossier.
La démarche reçoit l’assentiment de la majorité des éditeurs. « La certification est une bonne chose pour nos clients, souligne-t-on chez Sephira où l’on envisage « dans l’avenir » de passer cet agrément, elle garantit des ordonnances conformes aux réglementations en vigueur et sécurise les prescriptions. D’autre part, ce label est très positif pour les patients. Il incite à optimiser le coût des ordonnances (...) Il favorise un langage commun entre professionnels de santé et patients. » Sur le principe, il n’y a pas d’hésitation.
Cependant, pour tous les éditeurs interrogés, le marché des LAP ne décollera pas sans une intervention des pouvoirs publics. « Les pouvoirs publics n’ont pas accompagné la procédure d’agrément d’une incitation forte comme de faire bénéficier les utilisateurs d’un tel logiciel d’une reconnaissance de la qualité des soins, par exemple » regrette le Dr Pierre Bruneau chargé du dossier chez CLM (Cegedim Logiciels Médicaux). Alors que l’éditeur est favorable à la certification et s’estime bien placé pour le faire même si cela risque d’alourdir l’interface. « Ce qui s’impose à l’éditeur ne s’impose pas au médecin, déplore Thierry Kauffmann de Prokov Editions (Medistory). « Ce devrait être un avantage dans l’évaluation des pratiques professionnelles » propose-t-on chez Axilog (Axisanté).
Le coup de pouce pourrait également être financier. « Comme la certification induit l’abonnement à une base médicamenteuse agréée HAS, une aide abonnement serait sans doute appréciée » souligne Yves Martin d’Ouvrez-la-Boite (Shaman). « Il serait intéressant que les utilisateurs soient encouragés par une subvention lorsqu’ils utilisent un logiciel certifié comme cela se fait en Belgique » suggère Martial Bellegarde, chez FISI qui est présent sur le marché Belge.
Vers une incitation financière ?
Un exemple dont la HAS, consciente de la nécessité de promouvoir les LAP, pourrait s’inspirer. « Nous recherchons la possibilité de mettre en place des mécanismes d’incitations financières comme cela existe en Belgique, déclare au Quotidien Étienne Caniard, on peut imaginer que l’assurance-maladie soit intéressée par l’utilisation d’outils qui contribuent à la réalisation d’objectifs de qualité et d’efficience. Il est indispensable que plus généralement l’informatique médicale intègre des fonctionnalités susceptibles de contribuer à la qualité des soins, et de répondre à l’attente des professionnels de santé. Dès lors ce sera l’intérêt de tous de promouvoir ces outils y compris sur un plan financier. » Le Conseil de l’Ordre qui souhaite jouer un rôle dans le développement d’une plate-forme de prescription électronique pourrait également apporter son concours.
*Loi du 13 août 2004 relative à l’assurance-maladie : « La HAS est chargée d’établir une procédure de certification (..) des logiciels d’aide à la prescription médicale ayant respecté un ensemble de règles de bonne pratique. »
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