Les attaques des sénateurs se succèdent ces dernières semaines pour réclamer une régulation de l'installation des médecins. En février, avec des élus locaux, ils étaient tombés d’accord pour estimer que « l'incitation n'est pas la solution contre la désertification médicale ».
Les sénateurs ont à nouveau dressé un « constat d'échec » des politiques incitatives à l'occasion d'un débat sur l'offre de soins dans les territoires ruraux organisé à l'initiative du groupe RDSE (Rassemblement démocratique et social européen).
« Certaines MSP manquent déjà de médecins », a constaté le sénateur (RDSE) du Gers Raymond Vall, très remonté. Et la situation ne devrait guère s'améliorer, puisque les statistiques du CNOM font état de 52 000 praticiens « prêts à prendre leur retraite d'ici 5 ans ».
Poussée des mécontents
Raymond Vall milite pour une réforme des études. Mais comme ces mesures tarderont à produire leur effet, il faudra selon lui, dans l'attente, « définir une durée pendant laquelle les jeunes médecins devront s'installer en milieu rural ». Le parlementaire plaide également pour « supprimer toutes les aides financières » aux médecins qui voudraient malgré tout s'installer en zone surdotée.
Une majorité de sénateurs souhaite comme lui, passer à des mesures coercitives. À l’opposé, quelques irréductibles persistent à vouloir donner du temps aux mesures incitatives.
Yves Daudigny, sénateur socialiste de l'Aisne, ménage la chèvre et le chou. « La régulation de l'installation des infirmiers a eu un effet positif, mais n'a pas tout rééquilibré », affirme-t-il. Prudemment, il milite pour « une approche globale » pour régler le problème. Alain Milon, sénateur « Les Républicains » du Vaucluse, rappelle que selon les statistiques de l'Ordre, le nombre d'installation en zones surdenses diminue. « Ça montre bien que quand on laisse les intéressés régler eux-mêmes leurs problèmes, ça marche », analyse-t-il.
Enfin, Françoise Laborde, sénatrice RDSE de Haute-Garonne, s'interroge : maisons de santé, contrats d'engagement de service public (CESP, bourse), praticien territorial de médecine générale (PTMG, salaire minimum garanti), « cela suffira-t-il » ?
Une installation pour un départ
Du côté des partisans de la régulation forcée, on ne manque pas d'arguments. « Il est vain de penser que l'incitation suffira alors que le conventionnement sélectif a démontré son efficacité », assure Françoise Gatel, sénatrice UDI d'Ille-et-Vilaine. Dans les zones surdotées, elle milite pour le donnant-donnant : une installation pour un départ.
Laurence Cohen, sénatrice communiste du Val-de-Marne, emploie les mots qui fâchent : « il faut s'attaquer à la répartition géographique des médecins, assure-t-elle, et aller vers le contraignant ». Selon elle, en échange de la prise en charge du coût de leurs études, les médecins devraient « contractualiser leur installation avec l'assurance-maladie ».
Enfin, Hervé Poher, médecin généraliste et sénateur écologiste du Pas-de-Calais, verse dans la prédiction : « il faudra un jour toucher à la liberté d'installation même si les lobbies qui s'y opposent sont puissants. On y viendra », assure-t-il.
Si le débat avait donné lieu à un vote, nul doute que les sénateurs auraient enterré la liberté d'installation.
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