LES MÉDECINS ne s’y sont pas trompés. Après les très mauvais chiffres du printemps sur le taux de substitution des génériques (72 % en avril 2012 contre 79 % sur l’ensemble de 2010), la Caisse nationale d’assurance-maladie (CNAM) a affiché sa volonté d’inverser rapidement la tendance. Par tous les moyens.
Mettant à profit les négociations sur la nouvelle convention pharmaceutique, Frédéric van Roekeghem, directeur général de la CNAM, a pu renforcer une disposition existante mais inégalement appliquée baptisée tiers payant contre générique (TPCG). Ce mécanisme sensible, lorsqu’il est employé sans nuance, interdit le bénéfice du tiers payant aux patients refusant la substitution d’un princeps par un générique. Parallèlement, l’objectif de substitution des pharmaciens était fixé à 85 % pour 2012. L’enjeu est de taille : un gisement d’économies de deux milliards d’euros en année pleine.
L’affaire du « NS ».
Le dispositif n’a pas tardé à produire ses effets puisque le taux de substitution dépasse désormais les 80 % à fin septembre. Mais à quel prix ? La performance a provoqué quelques ruptures de stock chez des génériqueurs, les fabricants ayant plus ou moins bien anticipé cette dynamique.
Surtout, la politique du « tout générique » s’est accompagnée de désagréments et de conflits locaux liés principalement à l’encadrement accru de la mention « non substituable », sous forme manuscrite, en toutes lettres et pour chaque ligne de prescription. Jugé « infantilisant » ou « débile », ce système a provoqué une levée de boucliers des prescripteurs. Des médecins ont eu maille à partir avec leur caisse primaire. Certains se sont heurtés à la colère des patients. La semaine dernière encore, un médecin généraliste grenoblois s’est fait agresser verbalement et physiquement par une patiente dont il était pourtant médecin traitant. Celle-ci l’a insulté et frappé à coups de parapluie pour avoir refusé de porter la mention NS sur l’ensemble de l’ordonnance qu’il venait de lui remettre.
D’une seule voix, les syndicats médicaux demandent l’annulation de la réglementation en vigueur sur la mention NS manuscrite, inconcevable et désuète à l’heure des ordonnances dématérialisées. Espace Généraliste a lancé une pétition internet pour réclamer la suppression de cette mesure. Près de 4 000 médecins l’ont signée en quelques jours, signe que le sujet est épidermique pour la profession, par ailleurs soumise aux objectifs de prescription dans le répertoire dans le cadre du paiement à la performance.
Chaud et froid.
Conscients des remous, les pouvoirs publics ont calmé le jeu. Marisol Touraine a promis de se pencher sur la question, et au besoin de faire un geste dès le PLFSS. La CSMF a déjà proposé un amendement supprimant l’obligation de porter la mention non substituable de façon manuscrite. Parallèlement, la CNAM qui avait commencé à sanctionner les officinaux loin des objectifs a fait parvenir mi-septembre aux CPAM une lettre circulaire rappelant les règles du TPCG. Elle précise par exemple que certaines molécules (Lévothyroxine, Buprénorphine, Mycophénolate mofétil) ne sont pas ou plus concernées par cette politique et que les anti-épileptiques n’ont jamais été visés.
Mais tout n’est pas réglé. La politique du tout-générique est d’autant plus controversée que tarde la publication du rapport de l’IGAS sur les médicaments génériques et les enjeux de leur bio-équivalence. Marisol Touraine s’est engagée à faire preuve de transparence. Les usagers réclament « une table ronde de haut niveau » en situation de recommander les adaptations nécessaires pour la garantie de bio-équivalence générique/princeps.
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