UN ARRÊT de la Cour de cassation en date du 18 septembre 2008 confirme noir sur blanc qu’une prescription hors AMM n’est pas, en soi, constitutive d’une faute. Dans cette affaire, un patient et son épouse ont recherché la responsabilité d’un sexologue, après un traitement contre un trouble de l’érection. Le médecin avait administré une injection à base de papavérine et d’un alpha bloquant à son patient souffrant de priapisme depuis 48 heures, alors que l’indication n’était pas celle-ci. L’injection avait entraîné une impuissance irréversible du patient. La Cour de cassation a considéré que le médecin avait correctement agi, notamment parce que le traitement préconisé était reconnu pour son efficacité en cas de dysérection.
La Cour d’appel de Rennes, dans un arrêt du 28 avril 2010, donne raison à un autre médecin ayant prescrit hors AMM. Il s’agit cette fois d’un rhumatologue, poursuivi pour une injection intra-discale d’Hexatrione (nucléorthèse) à un patient souffrant de fortes douleurs lombaires. L’injection avait causé une calcification ayant nécessité une intervention chirurgicale. Le patient a attaqué pour « mésusage ». La Cour d’appel l’a débouté, considérant, tout comme le TGI de Lorient avant elle, que la prescription avait été faite sans précipitation, conformément à la littérature scientifique de l’époque. Pour fonder sa décision, la Cour d’appel a retenu que la nucléorthèse était un geste « reconnu et même encouragé » à l’époque des faits, et qu’il était donc exclu que le rhumatologue eut pratiqué une expérimentation. L’injection a eu lieu en 1989. « Ce n’est qu’au début des années 1990 que les rhumatologues ont connu les complications de cette technique et vont l’abandonner », précise l’arrêt judiciaire. « L’absence d’information n’a pas causé de préjudice car même informé il (le patient, NDLR) aurait selon toutes vraisemblances accepté la prescription », estime la Cour, pour qui l’utilisation d’un produit hors AMM « n’est pas de facto constitutive d’une faute, le médecin gardant sa liberté thérapeutique à condition de pouvoir justifier son indication et son geste ».
Les magistrats jugeront-ils légimitimes les prescriptions de Mediator comme coupe-faim, alors qu’aucun pronostic vital n’était engagé ? Il est bien trop tôt pour le dire. Dans l’affaire de l’Isoméride, la Cour de cassation avait retenu la responsabilité du fabricant. L’Isoméride a été suspendu en 1997, mais dès 1985, l’Agence du médicament avait recommandé de ne la réserver qu’aux patients souffrant d’obésité majeure. Malgré les risques connus d’HTAP, l’Isoméride a continué à être prescrit dans le seul but de perdre quelques kilos superflus. Le laboratoire Servier, pour sa défense, avait soutenu que « ne peut pas être regardé comme défectueux le médicament qui produit des effets indiqués dans les notices (...) à la rubrique des effets indésirables ». « Tout producteur est responsable pour un défaut de son produit », a estimé la justice en 1998.
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