LORS D’UNE PRÉCÉDENTE séance de négociations conventionnelles, la Caisse nationale d’assurance-maladie a remis aux syndicats de médecins libéraux une analyse sur les « écarts de coût de prescription de médicaments ». Les résultats montrent la place « atypique » de la France en matière de dépense moyenne de médicament par habitant, au deuxième rang mondial (derrière les États-Unis).
Les enjeux sont considérables. Sur les 22 milliards d’euros de dépenses de produits remboursés, 12 milliards sont prescrits par les médecins traitants – soit un montant global moyen de 230 000 euros par médecin. Chaque médecin traitant prescrit en moyenne 305 euros par patient inscrit auprès de lui chaque année, constate la caisse. Plus de la moitié de cette enveloppe (soit 164 euros) concerne huit classes fréquentes – antibiotiques, antidiabétiques oraux, asthme et BPCO, anticholestérolémiants, produits de l’HTA, antidépresseurs, tranquillisants, IPP – même si la CNAM relève des disparités considérables d’un médecin à l’autre (structure de la patientèle, pratiques, recours aux génériques…).
L’assurance-maladie a procédé à deux types de comparaisons des prescriptions : avec d’autres pays d’une part, et entre médecins français d’autre part. Sur le premier point, elle a ciblé deux classes thérapeutiques (IPP et statines) pour lesquelles elle estime que des marges significatives de progrès existent. « Pour ces deux classes qui représentent 2,3 milliards d’euros, nous aurions près d’un milliard de dépenses en moins si notre dépense par habitant était identique à celle de l’Allemagne ou du Royaume-Uni », précise la caisse. Sur les statines par exemple, l’écart de dépense par habitant atteint 37 % avec le Royaume-Uni et même 73 % avec l’Allemagne. Quant aux comparaisons entre médecins français (pour un praticien donné, on classifie ses patients en groupes homogènes et on mesure, pour chaque groupe, les écarts entre la dépense de prescription réellement observée et celle qu’il aurait si son niveau de prescription correspondait à celui de la moyenne de ses confrères), elles révèlent également des différences « importantes » à patientèle comparable.
Logiciels certifiés d’aide à la prescription.
Que faire ? Avec les programmes de maîtrise dite médicalisée, classe par classe, et certains indicateurs médicoéconomiques du contrat d’amélioration des pratiques individuelles (CAPI), la CNAM a déjà des outils de régulation des prescriptions. Mais l’objectif de la négociation serait d’aller plus loin. « Peut-on donner aux médecins plus de marges de manœuvre pour optimiser globalement les traitements médicamenteux » interroge la CNAM qui précise vouloir respecter la liberté de prescription et préserver la qualité des soins.
C’est un des enjeux du contrat « new deal » que la CNAM veut proposer aux médecins traitants dans le cadre de la nouvelle convention, l’utilisation optimisée des ressources collectives et de produits de santé étant récompensée (respect des indicateurs de santé publique, taux de génériques, hiérarchisation pertinente des prescriptions, utilisation de molécules les moins onéreuses à efficacité comparable…). « Clairement, comme les honoraires sont sous contrainte, la CNAM nous demande de trouver nous-mêmes des marges avec les prescriptions », explique le Dr Claude Leicher, président de MG-France.
L’assurance-maladie estime que plusieurs leviers sont « mobilisables ». Dans certains cas, l’objectif sera sans ambiguïté de réduire les volumes de médicaments. Dans le document remis aux syndicats, la caisse cite les benzodiazépines chez les personnes âgées, les antibiotiques pour certaines affections respiratoires hautes… Il conviendrait aussi de recourir à des « médicaments moins chers parmi les génériques ou molécules équivalentes ». Autre piste : les outils d’aide à la prescription « déjà disponibles ou facilement développables ». Dans le cadre du contrat new deal, la CNAM encouragerait l’utilisation de logiciels d’assistance à la prescription, certifiés par la HAS, mais aussi la participation à des programmes ciblés de formation professionnelle conventionnelle (FPC).
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