« Il existe plusieurs types d’approches face à un événement indésirable (EI), explique le Dr Frédéric Sintzel, médecin psychiatre au centre hospitalier Alpes-Isère (CHAI). Dans notre établissement, lorsqu’un tel événement survient, il est signalé à une cellule d’évaluation qui se réunit une fois par semaine et se charge de déterminer s’il est grave ou pas. Il y a plusieurs approches face à un EI : une revue de morbidité et de mortalité (RMM) peut être effectuée, ou un comité de retour d’expérience (CREX). »
Initialement développé en aviation civile, le CREX permet d’analyser les événements indésirables a posteriori, afin d’essayer de comprendre ce qui s’est passé avec les équipes et de prendre des mesures afin que cela ne se reproduise plus. « Il est important d’y inclure des temps de discussion, estime Corinne Giraud, infirmière au CHAI, qui a connu plusieurs fois des situations difficiles avec des patients. Même avec beaucoup d’expérience professionnelle. Nous ne sommes pas à l’abri de l’erreur et il faut pouvoir en parler. » Roland Chvetzoff, directeur de cabinet Latitude santé et consultant pour le CHAI, souligne qu’« il existe des situations où des décisions doivent être prises alors qu’on se trouve dans une impasse et qu’aucune solution n’est prévue : suicide d’un patient, agression d’un soignant ou d’un patient, fugue, etc. C’est difficile, car il faut savoir comment garantir la liberté d’aller et venir des patients tout en garantissant leur sécurité ». Il n’existe aucune réponse toute faite à ces questions et « la recherche vaine de cet équilibre est souvent à l’origine d’un profond sentiment d’échec chez les professionnels de la santé », constate-t-il.
Cohésion des équipes indispensable
En 2014, 1045 EI ont été signalés au CHAI, dont 800 pouvant être considérés comme graves. « Quand on déclare un événement indésirable, on ressent souvent de la culpabilité, témoigne Patrick Gérault, aide-soignant au service des troubles envahissants du développement (TED) du CHAI. En psychiatrie, nous sommes souvent confrontés à des situations violentes. On reçoit des personnes en état de crise qui sont souvent hospitalisées sans leur consentement. S’ils ne suivent pas les règles, c’est difficile à gérer pour nous. » Il pointe notamment « le manque de structures d’accueil » et « la baisse des durées d’hospitalisation », qui compliquent le travail des personnels soignants. « Si un médecin n’est pas présent quand il faut prendre une décision, c’est l’équipe infirmière qui doit gérer. En cas d’erreur, on se sent responsable en tant qu’aide-soignant, car on était présent au moment où elle a été commise. On veut tellement bien faire qu’on ressent parfois de la culpabilité, même quand il n’y a pas eu de faute... »
Roland Chvetzoff note que « souvent, plus un événement est grave, moins il est déclaré. Le soignant se sent toujours seul face à ce type de situation ». Pour lui, « répondre à ces événements par des fiches de déclaration ne suffit pas. Il faut mettre en récit l’histoire des soignants en amont, pour sortir du cercle vicieux de leur frustration et de leur colère et continuer à avancer ». En amont, la cohésion de l’équipe est indispensable et nécessite des échanges pluriprofessionnels quotidiens pour éviter les situations indésirables. « L’alliance thérapeutique nécessite du respect et de la confiance entre les soignants et les soignés, entre les équipes, mais aussi entre les soignants et leur institution », conclut Elsa Gauvin, cadre de santé au CHAI.
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