DANS LA MAYENNE, le Colonel Christophe Follet a pris l’été dernier ses fonctions de commandant du 42e régiment de transmission. Basé à Laval, ce régiment doit être dissous à l’horizon de 2011 à la suite des mesures de réorganisation de l’armée annoncées en juillet dernier par le Premier ministre François Fillon. En fin de semaine dernière, l’ensemble des médecins libéraux du département a reçu du colonel une bien étrange missive. Le militaire leur y explique qu’il constate dans ses rangs « un taux important, sinon anormal, d’absentéisme, pour raisons médicales ». Certes, continue le Colonel Follet, la plupart de ces congés maladie « reposent sur des fondements inattaquables », mais d’autres lui semblent « abusifs (...). Ce triste constat m’est apparu clairement en suivant de près le volume des absences de mon personnel, qui bien souvent concerne la même catégorie, composée de jeunes engagés, peu ou insuffisamment pénétrés des exigences du métier des armes ». Le colonel, médecin malgré lui, demande en conséquence à l’ensemble des praticiens libéraux du département de lui apporter leur aide « tout en respectant bien entendu l’ensemble de vos prérogatives et votre totale autonomie de décision, pour identifier ces cas et contribuer à réduire le taux d’absentéisme au sein de mon régiment, en le limitant aux pathologies avérées ».
« Basses besognes ».
Ce courrier a bien évidemment fait sauter au plafond les médecins du département, qui jugent sévèrement ce qu’ils considèrent au mieux comme une tentative d’ingérence dans leur colloque singulier avec le patient, au pire comme une invitation à la délation. Dans une lettre ouverte adressée au colonel, le Dr Luc Duquesnel, président de la CSMF-Mayenne, précise que ce courrier « suscite une grande émotion dans la profession tant il est méprisant à son égard. Quelle conception dévoyée avez-vous de la médecine générale, et quelle piètre opinion avez-vous des médecins généralistes mayennais ! Sachez que vous n’en trouverez aucun pour accomplir vos basses besognes. (..) Il n’est pas besoin d’avoir 40 de fièvre ou une jambe fracturée pour avoir un arrêt-maladie. Des pathologies beaucoup moins visibles, et plus longues à prendre en charge, peuvent le nécessiter ». Plus loin, Luc Duquesnel continue dans la même verve : « Sur un plan purement médical, le fait de voir seulement une catégorie de votre personnel concernée par des maladies amenant à ces prescriptions, est avant tout évocateur d’un problème de santé publique au sein de votre régiment, et nous ne pouvons que vous conseiller de vous rapprocher du service médical des armées pour analyser ces faits ».
Ségolène Chappellon, directrice de la DDASS de la Mayenne, est sur la même longueur d’onde que Luc Duquesnel, même si son statut l’oblige à un langage plus policé : « Il s’agit d’une initiative isolée et très maladroite. Ca ne correspond pas du tout au type de relations que nous avons établies avec les médecins du département, dont nous comprenons l’émotion ».
Contacté par « le Quotidien », le 42e régiment de transmission indique que le Colonel Follet est injoignable et son adjoint précise au que, « compte tenu de l'ampleur médiatique, regrettable, prise par cette affaire, il ne souhaite pas s'exprimer plus pour l'instant ». Mais au SIRPA-Terre (Service d’informations et de relations publiques des armées), le Lieutenant-colonel Pascal Testu, informé de l’histoire, indique sobrement qu’il s’agit d’une « initiative individuelle et malheureuse qui ne doit pas remettre en cause la qualité des relations que l’armée entretient avec le corps médical. Si le Colonel Follet exprime par là un réel souci de son personnel, le moyen choisi n’est pas le bon ».
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