Il y a dix ans, on ne donnait pas cher de l’avenir des livres consacrés par des médecins à des sujets médicaux.
« L’essor fulgurant des sites spécialisés santé était censé capter le public demandeur d’infos spécialisées et créer le vide dans les librairies », se rappelle l’éditeur Thierry Souccar. Mais contre toute attente, l’édition traditionnelle a très bien résisté face au numérique. Malgré la masse des données médicales mises en ligne sur le net, la vulgarisation scientifique, au bon sens du terme, continue de passer par le support du livre, avec une crédibilité jugée meilleure dans l’ensemble. Tous les éditeurs le confirment : les scores de vente de leurs titres en médecine sont stables. « Il y a toujours eu des médecins têtes de gondole », observe Aurélie Ouazan, éditrice chez Robert Laffont, des Françoise Dolto ou des André Sullivan qui caracolent dans les hit-parades des libraires. Aujourd’hui, sans focaliser sur « Le charme discret de l’intestin », les best-sellers médicaux restent relativement fréquents et tirent les chiffres vers le haut, au rythme de quelques titres chaque année. « Vous avez toujours des valeurs sûres, confirme Simone Baramian, chez Flammarion (un éditeur qui a vendu son département médecine universitaire il y a une dizaine d’années), avec des primes pour un public qui suit par exemple Jean-Michel Cohen sur les sujets nutrition et diététique. Par la porte médicale, on entre maintenant dans les thématiques de la vie saine, du bien-être. »
5 % du catalogue.
« Cette tendance s’affirme avec l’allongement de la vie, analyse Philippe Héraclés, PDG du Cherche-Midi. Comment vivre longtemps en bonne santé, c’est une question pour des lecteurs retraités qui disposent de plus de temps pour se documenter. Cela dit, il ne faudrait pas s’illusionner sur les chiffres : dans une maison comme la nôtre qui sort chaque année 150 livres, les livres de médecine écrits par des médecins représentent bon an mal an 5 % de notre catalogue et de nos ventes relatives. » Un éditeur spécialisé comme Thierry Souccar publie une vingtaine d’ouvrages par an, quelques-uns atteignent ou dépassent les 50 000 exemplaires, mais beaucoup ne diffusent pas au-delà des 3 000.
L’intérêt du public ne se démentant pas, il suscite parfois des vocations davantage marketing que vraiment médicales. Plusieurs éditeurs nous citent un auteur médecin à très grand succès, surtout remarquable, confient-ils, parce qu’il est très télégénique ; ses livres, qu’il n’écrirait pas lui-même, murmure-t-on, pillent des études bidon sur des questions fondamentales comme « vaut-il mieux dormir sur le côté gauche ? ». Et en surfant sur la vague du conseil pratique et la prise en main de sa propre santé, ils rapportent énormément d’argent. À en croire les commentaires laissés sur la toile, les lecteurs, piégés par le plan-média, ne seraient pas vraiment dupes : « Indigne d’un médecin », « d’une banalité affligeante », « un médecin qui conseille de faire du stop pipi, c’est tout bonnement du délire ». Malgré de nombreuses tentatives pour le joindre, l’éditeur concerné n’a pas souhaité répondre aux questions du « Quotidien. »
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