LE PR PASCAL GAUCHERAND, chef du service d’obstétrique de l’hôpital femme-mère enfant de Lyon, a été auditionné à deux reprises par André Gérin, député du Rhône et président de la mission parlementaire d’information sur le voile islamique intégral. Aujourd’hui, il explique au « Quotidien » combien les équipes qui, comme la sienne, sont confrontées au problème posé par le voile intégral, « mais aussi à tout ce qui va avec », ont besoin que les pouvoirs publics apportent clairement et rapidement leur soutien. En revanche, il ne se prononce pas sur l’opportunité d’une loi.
LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN - Le port du voile intégral vous pose-t-il un problème aujourd’hui plus qu’hier ?
Pr PASCAL GAUCHERAND - Pour moi, la réponse est oui. Depuis que la maternité de l’Hôtel-Dieu, du CHU lyonnais, a fermé ses portes, il y a un an et demi ou deux, notre service observe une recrudescence du phénomène. Mais il y aussi une amplification du fait religieux. Et puis, ce n’est pas forcément le voile en lui-même mais tout ce qui va avec, qui devient fréquent, et très perturbant.
Pourriez-vous préciser ?
Nous sommes confrontés, plusieurs fois par semaine, à un refus de serrer la main aux hommes, un refus d’être examiné ou que les soins soient apportés par des hommes. Or, qu’il s’agisse d’obstétriciens, d’anesthésistes, de sages-femmes, d’internes et d’externes, il y a des hommes dans le service ; nous sommes dans une société civile sans discrimination sexuelle, c’est donc normal qu’il y ait des hommes !
Une loi ne risque-t-elle pas d’amplifier ce phénomène, justement parce qu’elle le stigmatise ?
Je ne le sais pas. En revanche, ce que je sais c’est que ce phénomène augmente et qu’il est de plus en plus gênant dans l’exercice de notre profession. Nous ne sommes pas contre la liberté de culte, mais dans un espace public, nous sommes tous en situation laïque et il ne doit pas y avoir de discrimination sexuelle. Je ne suis pas politicien et ne me prononcerais pas sur l’opportunité d’une loi, mais il est impératif que le personnel soignant soit soutenu. Les équipes médicales y sont très attachées. J’ai eu plusieurs fois l’occasion de rencontrer la direction des Hospices Civils de Lyon, et, chaque fois, nous avons l’impression d’être seul à se débrouiller avec cette question. Aujourd’hui, nous avons donc vraiment besoin du soutien des pouvoirs publics.
Y a-t-il eu des contentieux liés au refus d’un soin par du personnel masculin, aux HCL ?
Il y a eu des agressions verbales, et même des agressions physiques, pas dans mon service mais dans celui de l’hôtel-Dieu. Les femmes qui refusent de vous serrer la main, les maris qui demandent aux médecins hommes de sortir de la salle pour un accouchement, un forceps ou une césarienne, ce n’est, de toute façon, pas acceptable.
Mais comment réagit la direction des HCL face à ces événements ?
Plusieurs courriers ont été envoyés, et une sorte de groupe d’éthique s’est mis en place, intégrant des soignants et également des représentants de toutes les religions pour mettre à plat cette question.
Pas à ma connaissance. Mais ne nous méprenons pas : je suis contre toute forme d’extrémisme, quelle qu’elle soit. Il se trouve que dans ma pratique professionnelle d’accoucheur, c’est avec la religion islamique que j’ai un souci. Mais la grande majorité des musulmans est charmante, agréable, avec un très bon relationnel. Ce sont les extrémistes, de plus en plus nombreux et bruyants, qui nous posent problème, les plus agressifs étant souvent les femmes françaises, converties à l’Islam ! Attention, je ne veux mettre aucune connotation politique dans mes propos, mais on ne peut pas chambouler l’organisation des services parce qu’une telle préfère être soignée par un homme !
Je ne le crois pas, car dans la grande majorité des cas, ce ne sont pas des personnes en situation de précarité. Nous suivons toute une frange de population dont les grossesses sont à risques, mais aussi des personnes sans domicile fixe ou socialement très défavorisées et qui ne posent aucun problème de cet ordre. Les extrémistes religieux ne sont pas les plus défavorisés.
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