L’écœurement des médecins s’exprime à Vannes

Publié le 21/06/2010
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VENDREDI à midi, puis vers 13 h 30, la trentaine de médecins qui ont répondu présents à l’appel de l’intersyndicale bretonne tournait autour du rond-point stratégique du Palais des Arts à Vannes. Banderole en tête, appelant à sauver la médecine de proximité, ces généralistes avaient la ferme intention de promouvoir leur action auprès de la population. Et de témoigner au-delà des revendications liées à la cotation CS, même s’ils ont beaucoup à dire sur ce seul sujet. Comme ces bizarreries administratives qui font que des consultations cotées CS mais facturées à 22 euros par un des représentants syndicaux ont été remboursées d’octobre 2007 à mars 2010 par la CPAM du Morbihan puis refusées depuis que le médecin concerné a passé ses consultations à 23 euros…

Dans le cortège, il y a par exemple ces deux jeunes médecins, remplaçants, « pas encore syndiqués »,mais venus apporter leur soutien au mouvement de grève. Ils demandent à l’unisson que leurs noms ne soient pas mentionnés. Lui, « parce que le conseil de l’Ordre pourrait nous taper sur les doigts si nous nous exprimons sans être syndiqué ». Elle, « parce que je n’ai pas encore passé ma thèse. Je ne voudrais pas que mon jury me saque ». Malgré tout, ils sont là et acceptent de témoigner pour que soit défendue la médecine libérale. « Quand on parle de devoir déclarer ses congés à l’agence régionale de santé [ARS], d’être contraint de participer à la PDS sous peine sinon de devoir payer une somme précise inscrite dans la loi… Ce sont des chamboulements inacceptables pour l’exercice libéral que j’ai choisi », souligne le jeune médecin. « Je crains les réformes en cours, l’arrivée des ARS, la forfaitisation », dit la jeune femme.

Le dévissage des plaques marque aussi les esprits. Il se dit qu’à Port-Louis, « en bord de mer pourtant et près de Lorient », selon un médecin de ce secteur géographique, 11 praticiens sur les 25 en activité auront arrêté dans sept ans. « Mais, les premiers vont partir dans deux ans, précise-t-elle. Avant de s’interroger : On s’est regroupés ces dernières années, comment va-t-on faire demain ? »

Toutes les difficultés ne se concentrent donc pas dans les milieux entièrement ruraux, comme au sud de Pontivy à Moréac (où deux médecins sont partis depuis un an, selon le Dr Philippe Le Rouzo) ou à Bignan (où un médecin cherche un remplaçant depuis un an). Installé à Pluvigner depuis 36 ans, le Dr Pierre Evanno n’est pas là pour « se » défendre : il arrête dans un an et demi. « Je me bats pour mes trois enfants qui sont médecins. Je sais bien que personne ne va prendre ma suite, quand on peut gagner plus en devenant médecin fonctionnaire. On a tellement dévalorisé la médecine générale. J’en suis écœuré… »

 DE NOTRE CORRESPONDANT OLIVIER QUARANTE

Source : Le Quotidien du Médecin: 8794