L’Institut statistique des professionnels de santé libéraux (ISPL) a été créé en 2007 par une poignée d’unions régionales de médecins libéraux. Aujourd’hui, 17 URPS « médecins » adhèrent à cette plateforme technique, dont l’objectif est de doter la profession d’un système mutualisé de gestion et d’analyse des données de santé (principalement issues des feuilles de soins produites par les praticiens).
L’open data en santé, les unions en ont compris les enjeux depuis très longtemps. « Nous avons besoin de données précises lorsqu’on discute avec les agences régionales de santé et les caisses primaires d’assurance-maladie, d’autant plus que nous en sommes producteurs ! », argumente le Dr Philippe Boutin, président (CSMF) de la conférence nationale des URPS. « L’analyse de l’offre de soins et des besoins d’un territoire est indispensable aux unions pour répondre à leurs missions », ajoute le Dr Jean-Pierre Binon, président de l’ISPL (qui organise demain un séminaire à Paris sur les données de santé).
Vision partielle
Certes, l’Institut a déjà accès au Système national d’information inter-régimes de l’assurance-maladie (SNIIRAM), en particulier aux données agrégées et non croisables (datamarts), mais aussi aux bases du PMSI (programme de médicalisation des systèmes d’information pour les établissements).
Mais l’ISPL n’a accès ni à l’échantillon généraliste de bénéficiaires (EGB, 600 000 personnes représentatives en permanence de la population française), ni aux données de consommation inter-régimes (DCIR), statistiques détaillées par bénéficiaire (identifiants anonymes) et par offreur de soins.
Le degré d’information existe donc pour la profession mais il reste parcellaire. Avec ces data, l’ISPL peut produire par exemple des études sur la consommation de soins par région et par département, ou sur l’activité des professionnels de santé libéraux, toutes spécialités confondues (en se fondant sur la nomenclature). « À la rigueur, on peut descendre au niveau de la commune pour les bénéficiaires, mais les données sont agrégées », précise le Dr Michel Paoli, médecin de santé publique et directeur de l’ISPL. « Nous pouvons comparer des honoraires ou des volumes d’actes, voir leur évolution, étudier des dépassements, analyser des pratiques et étudier la démographie », énumère le Dr Paoli.
Analyser les flux de patients, les parcours
En revanche, impossible, avec les données agrégées, de retracer des parcours de soins, les flux de patients, ou d’étudier les liens entre la ville et l’hôpital. « On peut savoir qu’un groupe de patients consulte un généraliste A, qu’un autre groupe voit un dermatologue B. Dans les deux groupes, on retrouvera les mêmes patients, mais on ne peut dire lesquels », poursuit le Dr Paoli.
L’ISPL a aussi accès chaque mois à un agrégat de données sur les ALD et les volumes de prescription par classes thérapeutiques (statines, etc.). Mais là encore, des progrès restent à faire. « Le cahier des charges date de 2007, nous souhaiterions avoir une vision plus fine des ALD et descendre à la molécule pour les médicaments », souligne le Dr Paoli.
Dans le contexte de la mise à disposition des données de santé, dont la loi de santé s’apprête à fixer les principes et les modalités, l’ISPL marque donc son terrain, au nom de la défense professionnelle. « Nous souhaitons avoir un accès identique ou proche de celui des ARS, avec une "granulométrie" plus fine que le département » explique le Dr Binon (ISPL).
Les échantillons et extractions de données les plus utiles (DCIR, EGB) sont aussi convoités pour les possibilités de chaînage qu’ils ouvrent. « Il serait intéressant de suivre des cohortes de patients ou de travailler sur la rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP) », fait valoir le Dr Paoli.
Les URPS se battent enfin pour intégrer la gouvernance de l’Institut national des données de santé (INDS), sorte de guichet unique simplifiant les démarches de demande d’accès, et dont la composition devrait être précisée par décret. « Nous ne sommes pas cités dans l’article (47) du projet de loi », déplore le Dr Boutin.
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