La dernière convention médicale, signée le 25 août dernier par trois syndicats de médecins libéraux (FMF, MG France et Le BLOC), consacre une version corrigée de la rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP). De nouveaux indicateurs ont été introduits sur la prévention des conduites addictives (tabac et alcool) ou encore le dépistage du cancer colorectal, portant à 1 000 le nombre total de points (au lieu de 940).
« La politique des petits pas a-t-elle porté ses fruits dans la ROSP ? », a lancé Alain Coulomb, ancien directeur de la Haute autorité de santé (HAS) en ouverture d'un récent débat organisé à Paris. Plusieurs médecins, enseignants et membres de société savante ont émis de sérieuses réserves, estimant que le dispositif d'amélioration des pratiques professionnelles n'était pas allé au bout de son ambition.
Le Pr Catherine Weil-Olivier a ainsi regretté que la vaccination soit « le parent pauvre de la ROSP », malgré des progrès dans la version 2016. « L'enfant doit être inclus dans les populations cibles à vacciner », a déclaré la pédiatre, qui enseigne à l'université Paris-Diderot. « Il faut renforcer, fédérer et coordonner les professionnels de santé autour de la vaccination », a-t-elle ajouté.
Certains indicateurs trop peu incitatifs
La CNAM entendra peut-être cet appel à l'heure où elle s'apprête à négocier avec les syndicats de praticiens libéraux un avenant sur la ROSP du médecin traitant de l'enfant, dont les généralistes et pédiatres espèrent bénéficier dès 2017.
Sur l'indicateur lié au tabac, le Dr Anne-Laurence Le Faou, responsable du centre d'addictologie à l'hôpital européen Georges-Pompidou (HEGP), estime qu'il s'agit d'une « première étape » un peu timide. « Attribuer seulement 20 points au médecin qui remplit cet indicateur est trop peu incitatif », estime le Dr Le Faou, qui appelle par exemple la création d'une consultation dédiée. « La rémunération sur objectifs est un instrument utile mais elle doit être ambitieuse et aider les praticiens », a conclu l'addictologue.
Michèle Delaunay, députée PS de Gironde, partage ce point de vue. Engagée dans la lutte contre le tabac, la cancérologue a appelé à continuer de valoriser les actions des médecins par ce dispositif. Actuellement, la ROSP représente 4 514 euros supplémentaires en moyenne pour les quelque 89 500 médecins qui la touchent (6 756 euros pour les seuls généralistes).
Les sociétés savantes davantage associées
Les représentants de sociétés savantes ont de leur côté regretté d'avoir été associés tardivement à la conception de la ROSP.
Le Dr Luc Martinez, vice-président de la Société française de médecine générale (SFMG), reproche au dispositif de ne pas avoir été analysé économiquement avant sa mise en place il y a quatre ans. « Il est nécessaire de changer de philosophie et de s'assurer de l'efficience de certains indicateurs avant de les introduire », a-t-il commenté, soulignant que les patients pourraient participer à la prise de décision.
« Il faudrait avoir plus de données factuelles et que les indicateurs soient révisés annuellement par les acteurs de soins et les tutelles, a plaidé à son tour Pr Pierre-Louis Druais. Le président du Collège de médecine générale (CMG) juge toutefois « pertinente » la démarche du directeur de la CNAM, Nicolas Revel, qui a associé le CMG à l'introduction dans la nouvelle convention de certains indicateurs (cancer colorectal, tabac, détection de l'obésité de l'enfant...). Selon le Pr Druais, la ROSP constitue un « bel outil de réflexion pour modifier les comportements et les pratiques » de la profession.
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