VITRY-SUR-SEINE. En ce mercredi matin, la place du marché est noire de monde. À quelques pas de là, le centre municipal de santé (CMS) Pierre Rouquès démarre une journée de consultation. Les trois étages de ce bâtiment de 2 400 m2 inauguré en 2007 se transforment en fourmilière. Le CMS abrite plus de 30 professionnels médicaux et paramédicaux (médecins généralistes et spécialistes, infirmières, chirurgiens-dentistes, kinésithérapeutes, assistante sociale…). Il propose une offre de services complète en radiologie, analyses médicales et assure des campagnes de vaccination des enfants et des adultes, des consultations de dépistage du sida…
« Les centres de santé sont les héritiers du communisme de la ceinture rouge, assume le Dr Alain Beaupin, médecin directeur du centre depuis 1998. Je revendique l’héritage des dispensaires, les valeurs de solidarité, d’écoute des plus humbles. Les centres de santé sont en phase avec les valeurs médicales et les patients y sont très sensibles ».
Comme de nombreuses communes de la banlieue parisienne, Vitry-sur-Seine mise sur son centre de santé pour faciliter l’accès aux soins pour ses 85 000 habitants. La commune héberge trois foyers de migrants dans les quartiers de Concorde, Manoukian et Rondenay. Des habitants pour qui se pose parfois la question du financement des soins.
Alternative.
Comme beaucoup de centres de santé, le CMS pratique le tiers-payant intégral. Les patients n’acquittent que la part non remboursée par la Sécurité sociale. Les adhérents de mutuelles conventionnées bénéficient de la gratuité des soins. Vitry-sur-Seine ne manque pas de médecins libéraux mais pour la médecine spécialisée, le centre de santé est une alternative pour beaucoup de patients. « Tous les appels que l’on a, ce sont des gens qui ne peuvent pas se payer le secteur II, constate Gwenaelle, qui assure l’accueil des patients et répond au téléphone. Les gens préfèrent attendre un peu pour prendre un rendez-vous chez nous car ils n’ont pas les moyens de payer 70 euros une consultation d’ophtalmologie en secteur II ». Rançon de ce succès : la fréquentation du centre s’est envolée ces dernières années. Depuis son installation dans ses nouveaux murs, le CMS, ouvert toute l’année 56 heures par semaine du lundi matin au samedi midi, a enregistré une augmentation de 38 % de passages (80 000 en 2011). Quand les rendez-vous sont ouverts pour le mois suivant, l’accueil téléphonique sature d’appels et l’agenda des professionnels est parfois rempli en deux jours. « Nous avons des délais de rendez-vous trop longs dans plusieurs spécialités, reconnaît le Dr Beaupin, en ophtalmologie, gynécologie, dermatologie, phlébologie ou angiologie ». Le médecin directeur a récemment été confronté au cas d’une jeune patiente enceinte. « La maternité de Bicêtre a demandé de se tourner vers la médecine de ville et nous n’avons pas pu lui donner de rendez-vous. Il est difficile pour les femmes enceintes d’accéder à un suivi des grossesses », explique Alain Beaupin.
Une "PME" à but non lucratif.
Avec 89 salariés, le CMS tourne comme une petite entreprise. Son budget prévisionnel est de 5 millions d’euros pour 2012. L’an dernier, la municipalité de Vitry-sur-Seine a participé à hauteur de 1,8 million d’euros à son financement. Les médecins, généralistes comme spécialistes, ont tous le même salaire : 5 800 euros bruts mensuels pour un temps plein de 35 heures par semaine. La particularité du centre de santé est que les professionnels ne sont pas soumis à des cadences infernales et aux soins à la chaîne. « Il arrive que des patients me demandent "qu’est-ce que je vous dois ?"et je ne sais même plus à combien est le CS, s’amuse le Dr Agnès Blanc-Guiraud, gynécologue médicale qui exerçait encore il y a dix ans en libéral… Ici, je n’ai pas de pression pour faire du chiffre. »
« Le centre de santé est un repère fort pour les patients, analyseHélène, interne en médecine générale de 28 ans, qui réalise son stage autonome en soins primaires ambulatoire supervisé (SASPAS) au CMS. Le centre dispose d’un matériel de qualité, d’un dossier médical partagé, d’une coordination des soins entre les professionnels. C’est un outil intéressant pour améliorer l’offre de soins ».
En attendant son rendez-vous, Bhia, 65 ans, vante les mérites du CMS. « Ici, on n’attend pas des heures et les médecins prennent le temps de vous écouter. J’ai un médecin traitant en ville mais je préfère venir ici pour les dents ou la mammographie. Avec la carte Vitale on n’avance pas les frais. Pour des retraités qui n’ont presque rien, ça compte. Ca permet à tout le monde de se faire soigner. »
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