Assureur couvrant les deux tiers des médecins libéraux et près de la moitié des médecins hospitaliers, la MACSF a dévoilé ce mardi dans son rapport annuel la sinistralité propre à l'épidémie de Covid. Une quarantaine de dossiers ont été ouverts.
Ceux-ci concernent d’abord des pertes de chances ou des sinistres liés à la déprogrammation d’actes médicaux ou d’interventions chirurgicales. À titre exemple, des coloscopies et des colposcopies ont été annulées ou reportées, ce qui a entraîné la découverte tardive de cancers. La MACSF cite le cas d’une cécité unilatérale, à la suite du report de l’opération d’une patiente, d’avril à septembre 2020.
La plupart du temps, dans ces déprogrammations, « les praticiens n’avaient pas la main et n’avaient pas la possibilité de forcer les tableaux opératoires pour réaliser les interventions », précise Nicolas Gombault, directeur général délégué de la MACSF, qui espère que les magistrats tiendront compte du contexte sanitaire.
Infections nosocomiales
Deuxième poche de risques majeurs liée à la pandémie : la contamination par le virus, dans le cadre de soins en Ehpad ou en cabinet de ville. À titre d’exemple, des médecins coordonnateurs d’Ehpad ont été mis en cause à la suite de plusieurs décès de malades. Pour ce type de sinistres, les règles juridiques diffèrent en fonction du lieu de contamination.
Si la contamination s’est déroulée dans un cabinet libéral, le patient devra non seulement prouver avoir été contaminé dans le cabinet mais aussi « démontrer la faute du professionnel de santé, ce qui ne sera pas forcément évident », précise Nicolas Gombault. Mais si les faits se sont déroulés à l’hôpital, « il y a fort à parier que les magistrats considèrent que cette contamination représente une infection nosocomiale », poursuit le DG de la MACSF. Dans ces conditions, l’« obligation d’indemnisation de toutes les séquelles » sera à la charge des établissements, sans pour autant qu’une faute ne soit établie.
Indemnisation par l'ONIAM
En cas d’infection nosocomiale dans un établissement, il y a aussi la possibilité, si le patient décède, d’invoquer une indemnisation par l’Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM) chargé d’indemniser les décès et les infections nosocomiales qui provoquent une incapacité de plus de 25 %. Dans le budget de la Sécu pour 2022, la dotation à l’ONIAM a d’ailleurs été singulièrement augmentée car « le législateur pense qu’il y aura plus de dossiers où l’ONIAM sera sollicité pour indemniser des infections nosocomiales graves en lien avec les hospitalisations de la crise sanitaire », estime Nicolas Gombault.
Par ailleurs, la MACSF a abordé les sinistres liés à la vaccination Covid. Malgré la crise sanitaire, seule une dizaine de sociétaires de la MACSF auraient été mis en cause dans un dossier. Il s’agit de trois décès et d'une thrombose de l’œil. Mais des dossiers font également état de vaccination avec des seringues usagées ou de l’injection de sérum physiologique en lieu et place du vaccin.
Dans le cas précis des sinistres liés à la vaccination, le gouvernement a finalement opté pour que l’ONIAM soit en charge de l’indemnisation des conséquences dommageables d’une vaccination contre la Covid-19. Le ministère de la Santé a précisé que la responsabilité des professionnels de santé pourrait être engagée, en cas de faute grave. Mais il n’y a pas eu à ce jour de décisions de justice en ce sens.
La téléconsultation, un risque qui existe
Enfin, la téléconsultation représente un sur-risque de sinistre, selon la MACSF. Celle-ci a en effet été également rendue possible pendant la pandémie sous de nouvelles modalités dérogatoires : téléconsultation sans connaître préalablement le patient et « uniquement par téléphone » (et non par visio). Ainsi, par exemple, dans le cas du décès d’un patient diabétique de 40 ans, des suites d’un coma diabétique, sept jours après une téléconsultation pour une mycose buccale, une plainte pénale pour homicide involontaire a été enregistrée.
Dans un autre dossier, un patient de 55 ans positif au Covid avait effectué deux téléconsultations pour des céphalées, une fièvre et des vomissements. Il souffrait en réalité d'une péritonite qui lui a été fatale. On reproche désormais au médecin de ne pas avoir fait le bon diagnostic.
C’est pourquoi la MACSF recommande d’interrompre rapidement une téléconsultation lorsqu’un examen clinique s’avère nécessaire. Mais aussi de prévoir, si nécessaire, un temps de consultation rallongé pour permettre un interrogatoire complet, voire d’élargir l’interrogatoire du patient, pour aller au-delà du motif invoqué par le patient, surtout quand on ne connaît pas le malade.
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