Tabassé par un patient, un généraliste du 93 écœuré par le manque de soutien de l'Ordre et de la caisse

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Publié le 30/11/2018

Jeudi matin, le Dr Olivier Benais a été violemment agressé dans son cabinet par un patient et ses acolytes. Quelques minutes plus tôt, vers 8h, il avait refusé à ce malade une consultation alors qu’il recevait ce jour-là sur rendez-vous. « Il est revenu avec deux autres personnes. Ils avaient des bombes lacrymogènes et ils m’ont tabassé, ils m’ont volé ma montre », témoigne ce généraliste installé depuis 20 ans à Romainville en Seine-Saint-Denis (93).

Visage tuméfié, le médecin a porté plainte à la police. Mais il en veut au conseil départemental de l’Ordre et à la caisse qui l’avaient sanctionné d’une suspension d’exercice il y a plusieurs mois en raison de son activité hors norme, mais sans rien lui reprocher sur le plan médical. « À l’époque, on m’a demandé de fermer mon cabinet plus tôt, de refuser les patients. Mais voilà ce qui arrive quand vous essayez de le faire », explique au « Quotidien » le généraliste qui ne décolère pas.

Pénurie médicale

Au cours des dernières années, le Dr Benais a vu son activité considérablement augmenter avec le départ en retraite de nombreux confrères. Son cabinet tourne de 7h30 à 21h en semaine, est ouvert le samedi et pendant les congés pendent lesquels le médecin se fait remplacer. En moyenne, il dit réaliser jusqu'à 70 actes par jour. Résultat, des statistiques de consultations bien au-dessus de la moyenne nationale qui ont fait tiquer la caisse et l’ont conduit à saisir l’Ordre (*).

« Depuis, j’ai demandé au conseil de l’ordre départemental, au national et à la caisse comment je pouvais m’en sortir. Ils se sont renvoyés la balle et je n’ai eu aucun soutien », raconte le généraliste qui insiste sur la pression des patients. « Il n'y a pas de confrère disponible. Vous les envoyez aux urgences ? Ils reviennent le lendemain en vous disant qu’ils n’ont pas pu être pris en charge », explique-t-il.

« Il fait être sur le terrain pour comprendre »

Le médecin crie son ras-le-bol : « Trop c’est trop. Je suis écœuré. C’est pas possible de toujours remettre la faute sur les médecins de base. Au lieu de nous féliciter, on nous bombarde ! C’est très facile derrière son bureau de dire qu’il faut limiter les actes. Mais il faut être sur le terrain pour comprendre que ce n’est pas aussi simple. »

Le Dr Benais pourrait bénéficier d’un arrêt de travail suite à cette agression. Mais pas question de fermer le cabinet, il se fera remplacer. « Je ne peux pas fermer. Les patients vont être à la rue. Vous voulez qu’ils aillent où ? Il n’y a plus de médecin et les urgences sont saturées ! »
 

(*) [Mise à jour le 4 décembre 2018] Suite à la publication de cet article, le Dr Benais précise que « son cabinet tourne actuellement de 7h30 a 21h tous les jours de l'année grâce à l'intervention de deux médecins collaborateurs récemment mis en place ». Il ajoute que sa « moyenne annuelle 2018 est passée à 50 actes par jour avec des accès à 70 en cas de pics épidemiques ». Après l'agression dont il a été victime, le généraliste précise n'avoir trouvé aucun remplaçant acceptant de travailler dans le secteur et qu'il a choisi d' « assurer ses permances au moins à mi-temps pour assurer la continuité des soins des patients et ne pas les laisser tomber ».



Source : lequotidiendumedecin.fr