Le quinquennat de François Hollande a-t-il été bénéfique pour la santé ? Point du tout, affirme Philippe Rollandin, journaliste et consultant en santé. Dans un ouvrage réquisitoire*, l'auteur, observateur du secteur depuis 35 ans, instruit un procès en immobilisme au chef de l'État, accusé de n'avoir mené en réalité aucune réforme structurante. « Les Français ne sont pas mieux soignés, affirme-t-il, les médecins pas plus satisfaits de leur sort, les personnels hospitaliers pas moins stressés et les déserts médicaux sont toujours plus nombreux. »
Pas touche au mammouth hospitalier
L'ouvrage intitulé « Les pathologies chroniques du quinquennat » égrène les dossiers sur lesquels François Hollande et Marisol Touraine ont été mis en défaut. L'absence de coordination des acteurs (surtout entre la ville et l'hôpital), un dossier médical personnel toujours dans les limbes, un équilibre des comptes de la Sécu en trompe-l'œil, des inégalités de santé toujours criantes...
Selon Philippe Rollandin, le président de la République et sa ministre de la Santé ont mené une « politique de l'édredon », consistant à ne faire de mal à personne et à amortir les chocs. « Tout a été fait ou presque pour éviter les conflits sociaux et les grèves, en particulier dans les hôpitaux, écrit le polémiste. Le chef de l'État a délibérément choisi de ne pas toucher au mammouth hospitalier en n'engageant aucune réforme de nature à réveiller une bête prompte à l'embrasement. »
En cinq ans, seule la manifestation nationale du 15 mars 2015 des professionnels de santé contre la loi de santé, qui a réuni à Paris 50 000 soignants mécontents, a pu faire vaciller Touraine. Selon Philippe Rollandin, François Hollande a acheté la paix dans le secteur et a fait de la santé un « amortisseur social ».
Convention archaïque ?
François Hollande et Marisol Touraine ne sont pas les seules cibles. Philippe Rollandin décoche quelques flèches aux syndicats de médecins libéraux qu'il connaît bien (il a assisté aux négociations conventionnelles en tant que conseiller en communication du SML). Il leur reproche par exemple de ne pas donner d'impulsion à la délégation de tâches pour se consacrer à des actes à haute valeur ajoutée. Il estime que l'opposition des médecins au tiers payant – pour préserver le paiement à l'acte – est une « erreur stratégique ». Surtout, la convention signée en août 2016 serait un « contresens », un « chef-d’œuvre d'archaïsme », ne permettant aucune innovation fondamentale, toujours centrée sur les revalorisations d'honoraires...
« Face à l'ubérisation de la médecine, au développement de la médecine prédictive et personnalisée et au big data, la seule réponse des négociateurs est la consultation à 25 euros et des forfaits structure pour créer des postes de secrétaires », ironise Philippe Rollandin. Loin des enjeux consistant à redonner goût à l'exercice libéral qui n'est plus choisi que par un étudiant en médecine sur quatre.
*Santé 2012-2017, les pathologies chroniques du quinquennat, aux Éditions du Net, 294 p., 19 euros. Recueil de chroniques publiées entre janvier 2012 et mars 2017 sur www.pharmaceutiques.fr et www.lalettredegalilee.fr
Pratique libérale : la chirurgie en cabinet, sillon à creuser
Le déconventionnement tombe à l’eau ? Les médecins corses se tournent vers les députés pour se faire entendre
Mélanie Heard (Terra Nova) : « Une adhésion massive des femmes à Kamala Harris pour le droit à l’avortement »
Et les praticiens nucléaires inventèrent la médecine théranostique