Le smartphone

Un nouvel acteur de la relation médecin malade

Publié le 07/03/2016
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Comment les dermatologues doivent-ils réagir face à l’irruption des nouvelles technologies dans leur relation avec les patients ? « Il s’agit d’une question importante et pour laquelle nous devons avoir une réflexion. Car tout va très vite dans le domaine des nouvelles technologies et il est clair qu’à l’avenir, cela aura des conséquences sur notre façon de faire de la médecine », souligne le Dr Thomas Hubiche,

Le Dr Hubiche prend un exemple très concret, qui a fait l’objet d’une étude du Groupe de recherche de la Société française de dermatologie pédiatrique : celui des patients qui se présentent en consultation avec des photos de leurs lésions cutanées prises avec leur smartphone. « C’est de plus en plus fréquent de voir des patients nous montrer des photos, prises quelques semaines plus tôt, de lésions qui, parfois, ont complètement disparu le jour de la consultation », explique le Dr Hubiche.

L’étude, publiée en octobre 2015 dans Jama Dermatology, a porté sur 162 patients dans 21 services de dermatologie pédiatrique ou générale. Ces patients, étaient âgés de moins de 10 ans pour 67 % d’entre eux. Au total, 60 diagnostics différents ont été recensés. Les plus fréquents étaient les suivants : urticaire (13 %), eczéma (6,8 %), psoriasis (6,8 %), exanthème viral (6,2 %), dermatite atopique (5,6 %). « Dans près de la moitié des cas (45 %), les photos étaient de bonne qualité et globalement, elles donnaient des indications souvent utiles pour la prise en charge diagnostique et thérapeutique de dermatoses inflammatoires, infectieuses ou chroniques », souligne le Dr Hubiche.

Ce dernier estime donc que les photos, prises par les patients, doivent être vues par le dermatologue. « Dans certains cas, cela permet de voir l’état initial d’une lésion et de mesurer son évolution. Cela donne des éléments d’appréciation intéressants, notamment dans le cas d’une dermatose qui évolue par poussées. Mais on doit aussi se poser des questions sur la place de ces photos, notamment d’un point de vue juridique. Si elles ont une influence sur le diagnostic ou la prise en charge du patient, il faut, à mon avis, en garder une trace dans le dossier médical », indique le Dr Hubiche.

Ces interrogations devraient se multiplier à l’avenir notamment avec le développement d’applications pour smartphone destinées au grand public. « On voit en effet de plus en plus d’applications pour aider le patient à enregistrer le niveau de sévérité de sa dermatose et le problème est que ces applications ne sont pas validées au plan scientifique. C’est la raison pour laquelle, sans nier l’intérêt de ces photos, nous devons être vigilants sur leur effet dans notre démarche diagnostique et thérapeutique », indique le Dr Hubiche.

D’après un entretien avec le Dr Thomas Hubiche, centre hospitalier Fréjus-Saint Raphaël
Antoine Dalat

Source : Bilan spécialiste