LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN : Depuis quelques semaines, tous les principaux leaders de droite s’adressent directement aux médecins libéraux, profession très en colère. Est-ce votre cas ? Quel est votre message ?
XAVIER BERTRAND : Oui, mais pour moi cela n’est pas nouveau ! Ce n’est pas parce qu’il y a une primaire à droite. J’ai toujours pensé qu’on ne pouvait pas réussir les réformes du système de santé sans les principaux acteurs – usagers et professionnels. Vous ne pouvez pas mener à bien un traitement si votre patient n’a pas envie de le suivre, vous ne pouvez pas réussir une réforme de la santé si les praticiens ne veulent pas l’appliquer. Il faut qu’ils y croient, qu’ils y adhèrent. La réforme de 2004 sur l’assurance-maladie a eu des résultats parce que j’ai réussi à avoir l’adhésion des professionnels de santé. Les politiques ne peuvent plus se contenter de proclamer "faites-moi confiance"...
Pensez-vous qu’il y a une rupture entre le gouvernement et les médecins libéraux ?
Oui. Le fait de ne pas avoir pris au sérieux ce qui, sur le fond, motive la contestation médicale et les opérations « santé morte » est simplement impensable. Les professionnels de santé ne sont pas dans une posture idéologique, ils disent qu’ils n’arriveront plus à accomplir leur mission essentielle. Ils ont le sentiment qu’on a atteint un point de non-retour.
Considérez-vous que votre expérience de ministre de la Santé est un avantage pour vous adresser à la profession ?
Ce n’est pas à moi de juger, c’est aux médecins ! Quand on les interroge sur l’action qui a été la mienne, ils reconnaissent que, même si je ne suis pas moi-même médecin, j’ai toujours compris la profession. J’ai trouvé des solutions pour mettre en place la réforme de l’assurance-maladie en 2004, qui ne les a pas stigmatisés. Je les ai associés comme de véritables partenaires. Quand je suis revenu fin 2010 [après la période Roselyne Bachelot], j’ai réussi à rétablir une confiance qui avait été mise à mal. Ce que j’ai fait par le passé pour les professionnels peut permettre que mon message soit reçu.
Si vous étiez aux affaires, est-ce que vous abrogeriez le tiers payant généralisé ?
J’ai été le seul à être clair : abrogation du tiers payant généralisé même si cette réforme semble populaire pour une partie de l’opinion. Le tiers payant généralisé obligatoire est une mesure idéologique qui fera plus de tort que de bien et marquera une cassure dans notre système de santé. Cette réforme montre que l’exercice libéral pose problème au gouvernement, pas à moi ! On est sur une remise en cause profonde, ce ne sont pas des mesures techniques.
Pensez-vous que la thématique « santé » devrait compter davantage dans les futures élections ?
La santé est le seul sujet qui n’a pas été abordé dans les deux dernières élections présidentielles lors des débats télévisés. Pourtant, c’est l’une des premières priorités des Français, mais pas des politiques. Il faut arrêter de considérer la santé comme un sujet secondaire ou mineur. C’est de la folie et de l’irresponsabilité.
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