Les résultats provisoires de la rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP) pour 2020, plutôt à la baisse à cause de la crise Covid, sont au cœur des discussions entre Assurance-maladie et syndicats de médecins libéraux, dont certains sont très critiques sur le dispositif.
La CNAM a reconnu elle-même, ce mercredi, « une évolution complètement atypique » des indicateurs de la ROSP en 2020 – avec une baisse des dosages biologiques, du suivi de pathologies chroniques (patients diabétiques, traités par AVK), ou de dépistage du cancer, en lien avec la crise sanitaire et la fermeture des cabinets pendant le premier confinement. « Cette évolution des indicateurs n'est pas significative de l'amélioration ou de la détérioration des pratiques, nous n'en tirons pas de conclusions sur qualité du travail des médecins en 2020 », insiste Julie Pougheon, directrice de l'offre de soins à la CNAM.
Deux spécialités à la traîne
Selon les premiers résultats déjà éventés par les syndicats (hors indicateurs déclaratifs), la rémunération totale de la ROSP atteindrait 294 millions d'euros contre 291,1 millions en 2019 (270 millions d'euros pour la seule ROSP adulte des généralistes). La rémunération des médecins traitant de l'adulte serait ainsi en hausse de 0,9 % sur un an, celle des médecins traitant de l'enfant en croissance de 8,9 % et celle des endocrinologues de 8,7 %. A contrario, les cardiologues voient leur rémunération baisser de 3,3 % ; celle des gastro-entérologues chuterait de 8 %.
Même s'ils sont en hausse pour une partie de la profession, ces résultats sont plombés par le moindre taux d'atteinte des indicateurs, et ce malgré une bonne évolution de patientèle dans certains cas (+1,3 % pour les médecins traitants adulte, +14 % pour les enfants) mais -2,8 % pour les cardiologues, -6,2 % pour les gastro-entérologues et -0,5 % pour les endocrinologues.
Pour compenser les piètres résultats sur les indicateurs (sans pénaliser les médecins qui ont connu des hausses de patientèle), la caisse a mis sur la table plusieurs solutions d'accompagnement. « L'objectif est de trouver quelque chose de lisible et de cohérent, sans complexifier le dispositif actuel de calcul pour garder un versement courant avril, car tant qu'on discute, la ROSP n'est pas payée », alerte Julie Pougheon, évoquant une discussion compliquée dans un contexte préélectoral.
Coefficient majorateur
Pour les généralistes, elle propose d'appliquer un « coefficient majorateur », calculé à partir de la différence entre les résultats d'évolution de la patientèle et l'évolution moyenne de la ROSP. Pour les médecins traitant de l'adulte, cela équivaut à un rattrapage de 0,4 %, pour ceux de l'enfant à 5,1 %. « On calculerait donc la ROSP de chaque médecin, en appliquant ensuite sur ce montant le coefficient correcteur, détaille la directrice de l'offre de soins. Ce système a le mérite de pouvoir être appliqué très rapidement dans les systèmes d'information et de préserver une date de versement proche. »
Insuffisant pour certains syndicats, dont le SML et la FMF, qui demandaient l'application d'une clause de sauvegarde, garantissant les mêmes montants qu'en 2019. Mais pour la CNAM, cette dernière solution pénaliserait les médecins dont la patientèle a fortement augmenté en 2020 – ou à l'inverse avantagerait ceux dont la patientèle a baissé.
Pour les deux ROSP spécialistes à la baisse, la CNAM propose « d'étendre la période d'observation de la patientèle de deux mois » pour compenser la période de confinement et donc l'arrêt des soins. Là encore, des syndicats préféreraient une clause de sauvegarde pour que les spécialistes touchent les mêmes primes qu'en 2019.
Ces différents scénarios seront discutés ce jeudi lors d'une commission paritaire nationale (CPN). La CNAM espère trouver une solution rapide. « Sans accord, la ROSP sera calculée et versée dans les conditions de droit commun, prévient Julie Pougheon. On doit donc trouver la meilleure des solutions. »
[Article mis à jour jeudi 4 mars, 18H] A la suite de la commission paritaire nationale (CPN), ce jeudi, les partenaires conventionnels ont voté à l’unanimité le principe d'une neutralisation de l'effet des évolutions des indicateurs dans la rémunération 2020, en ajoutant 0,4 % à la ROSP médecin traitant de l'adulte et 5 % à celle de l'enfant (aux taux d’évolution observés des ROSP 2020).
Pour les ROSP gastro-entérologues et cardiologues (impactées négativement), une clause de sauvegarde exceptionnelle maintiendra le montant des rémunérations au niveau de 2019. Cette décision « permet de tenir le calendrier prévu pour les versements à fin avril », précise la CNAM.
Le SML a réagi, soulignant que les revenus des médecins étaient préservés, tout en restant insatisfait de la ROSP « complexe, illisible et inégale ».]
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