Avec le 100 % santé, le gouvernement veut faciliter l’accès à des soins coûteux pour les Français qui pourraient y renoncer pour des raisons financières. Cette réforme a permis d’offrir un accès à des soins de qualité sans aucun reste à charge pour de très nombreux Français. Dans ces conditions, reste-t-il un avenir aux réseaux de soins des complémentaires santé ?
Chez Malakoff Humanis, nous avons mis en place depuis plus de 10 ans, avec le groupe VYV un réseau de soins, Kalixia, qui propose à plus de 15 millions d’assurés des soins optiques, audio et dentaires à des tarifs plafonnés. Or, nous avons pu mesurer un apport décisif du réseau à l’objectif gouvernemental d’accès aux soins, y compris avec la réforme du 100 % santé : en effet, le réseau Kalixia a permis de doubler l’impact de cette réforme pour les 15 millions d’assurés qui y ont accès. En optique, plus de 18 % des assurés bénéficient du remboursement intégral de leur équipement grâce aux tarifs négociés par le réseau et près de 50 % si l’on ne prend pas en compte les montures, contre moins de 10 % avec le 100 % santé ! En audiologie, ce sont près de 40 % des assurés qui n’ont aucun reste à charge contre 30 % environ grâce au 100 % santé. La vocation initiale des réseaux de soins, permettre l’accès à des soins de qualité avec un reste à charge faible voire nul est ainsi clairement confortée dans l’intérêt des assurés.
À l’échelle de l’ensemble des cinq principaux réseaux de soins présents en France, ce sont environ les deux tiers des Français qui choisissent de bénéficier de leur réseau de soins, ce qui a permis en 2022 à près de quatre millions d’assurés d’accéder à un équipement optique sans reste à charge, bien au-delà des seuls équipements 100 % santé.
Le 100 % santé n'est pas le 100 % gratuit
Nous ne pouvons que nous féliciter de voir l’accès aux soins progresser, et d’avoir contribué avec l’appui des réseaux de soins à augmenter significativement la part des assurés accédant à des équipements médicaux et des soins de qualité sans reste à charge. En revanche, nous devons porter un regard objectif et lucide sur le coût d’une telle réforme. Car laisser croire aux assurés que cette réforme ne leur coûtera rien est faux. Le 100 % santé n’est pas le 100 % gratuit.
En effet, rappelons que cette amélioration de l’accès aux soins est en grande partie (plus de 70 %) financée par les complémentaires santé qui prennent intégralement en charge les équipements 100 % santé, et ont vu le montant de leurs remboursements augmenter du fait de l’augmentation du recours aux soins audio et dentaires. Les prévisions gouvernementales de la réforme tablaient sur une baisse des dépenses en optique en compensation des hausses de deux autres postes. Or, les dépenses d’optique ont augmenté pour Kalixia d’environ 5,8 %, passant en deux ans de 1,3 Md€ à 1,4 Md€, alors qu’en audiologie par exemple, les dépenses prises en charge par les complémentaires via le réseau Kalixia augmentaient de 250 M€.
Des impacts sur les coûts pour les assurés ?
De plus, le 100 % santé doit privilégier son ambition initiale, c’est-à-dire l’accès à des soins coûteux et sans reste à charge pour les patients. À l’occasion de la nouvelle réunion du comité de suivi 100 % santé du 18 avril dernier, sous la présidence du ministre de la Santé et de la Prévention, François Braun, de nouvelles propositions ont été formulées. Il s'agissait d'élargir davantage le périmètre de la réforme du 100 % santé à de nouveaux équipements, notamment les prothèses capillaires, les fauteuils roulants ou encore le domaine de l’orthodontie. Si ces orientations peuvent sembler légitimes du point de vue des patients, il nous semble qu’avant d’engager de nouvelles dépenses potentiellement très élevées pour les complémentaires et donc pour les Français, nous devons considérer d’abord un bilan global et partagé de cette réforme. Notamment ses effets positifs pour l’accès aux soins, ses impacts sur les professionnels de santé, mais aussi ses effets « indésirables », en particulier le risque de surconsommation lié à l’absence de tout frein économique pour les patients. En effet, quelle serait la lisibilité d’un dispositif destiné à faciliter l’accès aux soins mais qui, en s’élargissant à l’excès, en renchérirait encore le coût pour les complémentaires santé et pour finir pour les assurés ? Dans le contexte d’inflation élevée que les assurés constatent dans leur quotidien, il faut leur tenir un discours de vérité, car si la santé n’a pas de prix, elle a un coût.
Nous continuerons à agir, en appui des complémentaires santé, pour favoriser l’accès aux soins. Le réseau Kalixia y contribue déjà et entend prendre toute sa part à cet objectif. Nous souhaitons contribuer à éclairer les réflexions sur l’évolution des domaines et équipements actuels du 100 % santé afin de prévenir toute dérive des dépenses préjudiciable à l’accès aux soins et au pouvoir d’achat, et répondre à un réel besoin médical.
Débat
58 % des médecins confrontés au burn-out ou à la dépression : comment en sortir ?
C’est vous qui le dites
« On m’a rapporté des consultations de généralistes à 150 euros »
Éditorial
Par-delà la méfiance
Tribune
Maladies rares et errance thérapeutique : et si l’IA nous permettait de sortir de l’impasse ?