Inscrire le « droit à l’IVG » dans la constitution ne semble intéresser qu’une bien faible partie de la population, encore que les sondages manquent sur ce point.
Le déclenchement de ce processus semble avoir pour origine un arrêt de la Cour Suprême des États-Unis (cassant un arrêt précédent de la même cour) décidant que la législation au sujet de l’IVG relevait de chaque état et non du niveau fédéral. Il s’agit là d’une problématique purement américaine dont toute transposition à la France n’a aucun sens, sauf à imaginer un fédéralisme européen achevé dont nous sommes tout de même assez loin.
Quels sont donc les arguments de nos rares compatriotes à se préoccuper de ce sujet ?
Ceux qui y sont favorables affirment vouloir « graver dans le marbre » de la Constitution un « droit fondamental » qui risquerait d’être supprimé à l’occasion d’un changement politique plus ou moins extrême.
Ceux qui sont contre affirment que la Constitution définit les fondements et les modes d’exercice du pouvoir et ne peut - sous peine de perdre une partie de sa prééminence - devenir un catalogue de règles sociétales. Ils ajoutent que la remise en question de l’IVG est d’une probabilité si faible qu’elle s’apparente au fantasme et qu’elle supposerait un bouleversement sociologique d’une telle ampleur que la protection constitutionnelle n’aurait plus de sens. (La France en étant à sa cinquième Constitution républicaine, toutes gravées dans le marbre…)
Ceux qui se préoccupent de sujets plus urgents considèrent que cette procédure s’apparente au problème du sexe des anges à Constantinople ou au bal sur le pont du Titanic et suggèrent que nos élus se préoccupent de sujets réellement importants.
Le bon sens pousserait donc à se désintéresser (bruyamment ?) de la question.
Et pourtant…
Le fait d’intégrer à la Constitution un droit à l’IVG, quelle que soit la sophistication des termes choisis, aurait une conséquence majeure : Il donnerait le droit au Conseil Constitutionnel d’être l’arbitre suprême et donc le maître absolu de l’évolution des modalités de l’IVG. Or n’oublions pas que l’infanticide était légal en droit romain (et n’a été interdit que par Constantin en 318). Toute régression en matière sociétale est possible. L’IVG à terme a été déjà légalisée dans l’Illinois et le Nebraska.
Peut-on confier la gestion de ces évolutions législatives à un Conseil aux membres nommés et inamovibles, pour partie politiciens à la retraite, hors de tout contrôle des élus ? La question mérite d’être posée.
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