Une star du paysage audiovisuel français est impliquée dans une affaire d’accident de la route suite à la prise de produits illicites.
Les médias se sont emparés de ce fait divers pour en reprendre les moindres détails (parfois pas très pertinents, mais très croustillants aux yeux de certains concitoyens).
Au-delà de cette histoire qui passionne visiblement les journalistes de toutes les chaînes télévisuelles mais aussi les rédactions des journaux, je reste (comme une frange de la population, qui je l’espère est suffisamment importante) très surpris par la tournure des événements, et de la place volontairement choisie par les responsables du paysage audiovisuel français.
On met très ou plutôt trop régulièrement sur le tapis cette histoire dramatique il faut le reconnaître, mais nous pouvons convenir qu’elle ne devrait pas obtenir un tel type « de traitement de faveur ».
Ce qui est le plus inquiétant, c’est de voir les réactions « épidermiques » très rapides de certains membres de l’exécutif.
Pour le ministre de l’intérieur la répression suite à la conduite sous l'emprise de drogues, doit être sans appel.
Le garde des sceaux est quant à lui resté muet, et n’a pas réellement communiqué sur les outils et la volonté de la justice de mettre en place un arsenal répressif à la hauteur des souhaits formulés par M. Darmanin.
Une politique de la toxicomanie quelque peu laxiste ou difficile à mettre en place ?
Dans la réalité, il faut bien le reconnaître il existe depuis des décennies un laxisme assez important concernant la répression des addictions chez les automobilistes, mais aussi les consommateurs réguliers qui n’ont pas de scrupules à demander de la drogue ou en acheter dans des lieux bien répertoriés.
Des films (BAC nord) ou des reportages au sein des cités montrent très régulièrement que les dealers sont les maîtres dans certains quartiers qui sont devenus des zones de non droit, cela malgré l’opposition souvent réprimée des habitants de ces zones HLM.
Le commerce de la cocaïne est très florissant, et personne ne prend en compte les études épidémiologiques qui mettent en avant une consommation accrue (elle se reflète dans l’importance des saisies effectuées) [1].
Les forces de l’Ordre ont une efficacité limitée compte tenu de leur nombre, mais aussi du fait d’une organisation très savante de ce trafic.
De plus, il ne faut pas nous cacher que les policiers n’ont pas souvent la volonté d’être répressifs, car ils savent que dans la plupart des cas les consommateurs n’auront qu’un rappel à la loi.
Quant à la prise en charge des patients toxicomanes elle se révèle souvent complexe car les professionnels (ils travaillent le plus souvent dans des associations ou des établissements hospitaliers) qui prodiguent des soins à ces personnes sont trop peu nombreux.
Par voie de conséquence ils n’arrivent pas à assurer la gestion de la totalité de ces patients.
Les médecins généralistes ne souhaitent pas, pour un grand nombre d’entre eux, prendre en charge cette problématique qu’ils considèrent fréquemment comme très complexe et pouvant engendrer parfois des risques pour leur propre sécurité.
De plus ces professionnels ne pensent pas avoir les capacités d’assurer une gestion de qualité de la toxicomanie, car il faut le reconnaître il est nécessaire que le praticien puisse s’impliquer sur un plan médical et psychologique.
Enfin l’addictologie est une discipline qui n’est pas nécessairement très prisée par les médecins qui ont pour certains du parti pris vis-à-vis de ces patients parfois roublards et peu compliants.
Tout cela pour bien faire comprendre que les politiques, suite à une montée en puissance d’une action médiatique qui engage une célébrité, montrent qu’elles ne sont pas de marbre vis-à-vis d’une situation humainement détestable.
Cependant, comme l’a fait remarquer la mère d’un enfant tué par un chauffard qui était sous l’emprise de cocaïne, il est plus facile de prendre des initiatives dès lors qu’une célébrité est impliquée dans un fait divers plutôt qu’un individu lambda qui n’est pas médiatiquement exposé.
Cependant certains oublient, les journalistes notamment, que nous sommes dans un pays démocratique et que nous sommes tous égaux vis-à-vis de la loi.
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(1) https://www.slate.fr/story/241282/epidemie-cocaine-france-addiction-dro….
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