Vous voulez faire un scanner ou une IRM corps total à visée de détection d’éventuelles maladies qui pourraient être prises en charge avant même qu’elles engendrent des symptômes ? Si, aux États-Unis, votre médecin refuse - ce qui est le cas la plupart du temps - adressez-vous à Prenuvo, une start-up qui vous promet un rendez-vous sans passer par votre praticien et même une négociation avec votre assurance santé pour le remboursement des 2 500 dollars de l’examen. Cette entreprise dont les slogans sont « La santé du futur commence ici » et « Pour vivre mieux, plus longtemps et en meilleure santé » a fait appel à l’influenceuse Kim Kardashian pour inciter ses fans à adopter le service de l’« intermédiaire en santé ».
Des start-up dans la plupart des cas
Qui sont ces intermédiaires en santé qui envahissent le marché des soins aux États-Unis depuis 2020 ? Des start-up - pour la plupart - qui ont eu l’idée de démarcher à la fois des médecins, des établissements de soins et des patients pour connaître les besoins non satisfaits par la relation médecin-patient telle qu’elle est proposée actuellement, dans un contexte de relative pénurie médicale en particulier de médecins de famille.
Ces nouveaux acteurs ont recensé différents axes de service : aider les femmes à poser les bonnes questions et obtenir les bonnes réponses sur la ménopause, proposer des visites de médecin à domicile alors que cette pratique est exceptionnelle dans le pays, assurer un accès à une échographie mammaire en cas de doute (même lorsqu’une mammographie a été récemment réalisée)… Ces nouveaux acteurs vont plus loin que les « simples » conciergeries médicales qui permettent d’avoir accès à des rendez-vous privilégiés dont les tarifs sont libres.
Si la plupart des services proposés sont à la charge des patients, il n’est pas rare que des intermédiaires négocient leur prise en charge avec les assureurs en mettant en avant les éventuelles économies de santé réalisées si une pathologie est détectée précocement. Résultat : on a assisté à une augmentation des tarifs des assurances privées qui prennent désormais en charge des soins « consuméristes » exigés par les patients et rendus possibles par ces nouveaux acteurs.
Obtenir les prix les plus bas pour les produits de santé et les prestations des soignants
Les intermédiaires proposent aussi un panel de prestations à destination des établissements de soins et des médecins : il est possible d’améliorer l’observance des traitements grâce à un centre d’appels au Mexique qui contacte les patients à l’heure des prises, par exemple. Autre axe – encouragé par les médecins – des start-up salarient des infirmiers pour recenser toutes les questions d’un patient, lui donner des éléments de réponses et d’orientation afin que seules les questions essentielles soient posées aux praticiens. Les intermédiaires mettent en avant une « responsabilisation du patient » grâce à une écoute plus attentive de leurs interrogations et leurs demandes.
Mais la principale mission de ces intervenants est de permettre d’obtenir les prix les plus bas pour le matériel médical, les médicaments (Pharmacy Benefit Managers, PBM) et de prestations de soignants (principalement la lecture d’imagerie par le biais de logiciels d’intelligence artificielle avec double lecture par un radiologue). En effet, les PBM ont fait leur entrée sur le marché de la santé dans les années 2010 avant de devenir des incontournables au cours de la décennie suivante. Aujourd’hui, ce sont les trois plus grandes firmes de PBM qui ont en charge 80 % du marché des médicaments et qui, en accord avec les assureurs qui les mandatent, décident des prix des médicaments et du reste à charge pour les patients. Le problème se pose particulièrement pour les assurés qui bénéficient des systèmes étatiques de soins (Medicare en particulier). Il s’agit généralement de personnes ayant des revenus limités (Obamacare) ou de personnes ne travaillant plus (invalidité ou retraite). L’augmentation du reste à charge, qui a été la conséquence des baisses des coûts imposés par les PBM au nom des assureurs, a introduit un biais dans la relation médecin-patients. Désormais, les médicaments et doses prescrites sont de moins en moins respectés par les patients du fait de choix de dépenses personnelles qui sont plus essentielles que la santé. Et nombre de patients n’osent pas l’avouer à leur médecin.
Un risque pour le suivi des patients en France ?
En France, déjà des centres privés (parisiens principalement) proposent des « bilans de santé » avec imagerie corps-total non remboursés par la sécurité sociale mais possiblement pris en charge par les employeurs soit en vue d’une expatriation, soit chez les cadres les plus indispensables au fonctionnement de l’entreprise. Et toute cette prise en charge est bien sûr réalisée hors du circuit du médecin traitant.
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