Dépendance aux opiacés : la buprénorphine par voie sous-cutanée aussi efficace que par voie orale

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Publié le 14/05/2018
subutex

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Crédit photo : Phanie

La buprénorphine administrée sous forme d'injection sous-cutanée (SC) à longue durée d'action donne d'aussi bons résultats dans la dépendance aux opiacés que l'association buprénorphine + naloxone par voie sublinguale (SL), montre une étude de non-infériorité publiée dans le « JAMA ».

L'intérêt de passer à une voie sous-cutanée est multiple. Si la buprénorphine par voie orale est efficace, ce type de formulation expose à « une adhérence suboptimale, un détournement, un mésusage intraveineux et des intoxications accidentelles par les enfants », rappellent les auteurs.

Une formulation spéciale

L'équipe multicentrique dirigée par Michelle Lofwall de l'université du Kentucky a testé le CAM2038, un produit qui a apporté la preuve d'un contrôle rapide du syndrome de manque et des cravings en moins de 24 heures. Le CAM2038 fait appel à une technologie dite « Fluid Crystal » : une fois injecté, le produit devient visqueux, formant des dépôts localisés à libération prolongée.

Réalisée chez 428 sujets dépendants aux opiacés pendant 6 mois (24 semaines), cette étude randomisée en double aveugle avait pour critère principal de s'assurer que la voie sous-cutanée s'accompagnait d'autant de sujets répondeurs que la voie orale. Un sujet répondeur était défini comme ne présentant aucun signe de prise illicite d'opiacés (test urinaire + autoquestionnaire) à des moments préspécifiés, au moins 8 sur les 10 prédéfinis.

Double placebo

L'étude américaine était réalisée en double placebo, le groupe SC ayant des implants sous-cutanés et un traitement placebo quotidien oral, le groupe SL ayant des implants factices et prenant de la buprénorphine + naloxone sublinguale.

Dans chaque groupe une titration était réalisée, permettant d'aller jusqu'à 24 mg/jour de l'association SL buprénorphine + naloxone et jusqu'à 32 mg/semaine de buprénorphine SC. De la semaine 1 à 12, une injection SC était réalisée à chaque visite hebdomadaire (16, 24 ou 32 mg, ce qui équivaut respectivement à 8, 16 et 24 mg/jour). Puis de la semaine 12 à 24, les visites se sont espacées à une fois par mois avec une injection SC mensuelle (64, 96, 128 ou 160 mg, ce qui équivaut respectivement à environ 8, 16, 24 et 32 mg/jour).

Des populations à risque particulièrement candidates 

Au total, le taux de répondeurs était de 14,4 % (n = 31/215) dans le groupe SL et de 17,4 % (n = 37/213) dans le groupe SC. La proportion de tests urinaires négatifs était de 28,4 % (n = 1 099/3 870) dans le groupe SL et de 35,1 % (n = 1 347/3 834) dans le groupe SC. Les effets secondaires au site d'injection (aucun grave) étaient plus fréquents dans le groupe SL (n = 48 ; 22,3 %) que dans le groupe SC (n = 40 ; 18,8 %).

Pour les auteurs, ces résultats appellent d'autres études pour utiliser plus largement les dépôts de buprénorphine SC. Certaines circonstances sont davantage candidates à l'utilisation de la voie SC, notamment à l'hôpital en cas de complications (par exemple endocardite et overdose) pour faciliter la mise en route et la poursuite du traitement à la sortie. D'autres populations sont citées également, par exemple en situation à risque d'interruption de traitement (incarcération) ou avec des difficultés d'adhérence, ou en cas d'exposition à des problèmes de vols et de confidentialité (voyage) ou à risque de mésusage.


Source : lequotidiendumedecin.fr