Une mauvaise communication en cancérologie

La singulière prise en charge du cancer chez les déficients intellectuels

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Publié le 26/11/2018
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ONCOLOGUE

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Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

« Les équipes d’oncologie rencontrent de réelles difficultés dans la prise en charge des personnes en situation de déficience intellectuelle. Le premier obstacle est lié au savoir-être et savoir-faire de ces équipes médicales. » Telle est la conclusion d’une étude menée par l’association Oncodéfi, organisatrice d’un congrès médical international tenu à Montpellier du 10 au 12 octobre 2018, dédié à la prise en charge du cancer chez les personnes en situation de handicap mental. 

Menée essentiellement dans le département de l’Hérault auprès d'oncologues des secteurs publics, privés et privé non-lucratif, cette étude a pour but de révéler les difficultés rencontrées par le personnel soignant, et de servir de base à une amélioration du parcours de soins. « La communication médecin-patient est très imparfaite. Dans ce cadre, le rôle de l'aidant indispensable », soulignent le Dr Daniel Satgé, anatomopathologiste, et Sarah Habib-Hadeff, assistante de recherche clinique, co-auteurs de cette étude. « Souvent, un patient déficient intellectuel, quand il est mal à l’aise, aura tendance à répondre “oui” pour se débarrasser d'une situation inconfortable ».

Une communication bienveillante nécessaire

Un trait de caractère que l’on retrouve en France comme en Grande Bretagne ainsi qu’en témoigne le Pr. Irène Tuffrey-Wijne, spécialisée en soins palliatifs et déficience intellectuelle au St George Hospital de Londres, présente lors de ce colloque. « Souvent, ce type de patients cherche à vous faire plaisir. Quand un aidant est présent, il faut vraiment travailler avec lui, qu’il soit un membre de la famille ou un professionnel, car il est celui qui connaît le mieux le patient », complète-t-elle. 

«Les personnes en situation de déficience intellectuelle comprennent plus de choses qu’on ne l’imagine. Pour cela, il faut parler lentement, simplement, répéter s’il le faut et s’assurer qu’il a bien compris », conseille-t-on chez Oncodéfi. 

Mieux comprendre la carcinogenèse chez ces patients

Lors de ce colloque où des chercheurs japonais, anglais, néerlandais, américains et français se sont succédés, il a également été question de la répartition des cancers chez les personnes atteintes de trisomie 21. S’il est connu que le risque de leucémie est augmenté et celui des cancers du sein et du colon diminué chez ces personnes par rapport à la population générale, la raison n’est pas encore clairement établie. « À la base, nous ne travaillons pas spécialement sur le cancer des personnes atteintes de trisomie 21. Cependant, nous avons identifié une protéine qui, chez ces personnes, pourrait avoir un rôle », explique le Dr Vincent Cavaillès, directeur de recherche CNRS en oncologie moléculaire à l'Institut de Recherche en Cancérologie de Montpellier. « Nous essayons de comprendre le rôle de cette protéine dans la tumorigénèse car elle semble fournir une protection dans le cancer du côlon et du sein. À l’inverse, elle pourrait favoriser certaines leucémies.

En utilisant des modèles de souris transgéniques, le même impact sur la formation de ces cancers a été noté. Nous venons d’obtenir des financements pour une nouvelle étude afin de vérifier ces observations. Elle va prochainement démarrer dans notre laboratoire », indique le chercheur. 

 

 

 

 

 

 

De notre correspondant à Montpellier, Guillaume Mollaret

Source : Le Quotidien du médecin: 9705