Santé publique : un chantier inachevé

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Publié le 04/05/2017
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La santé publique a indéniablement bénéficié d'un coup de projecteur au cours d'un quinquennat qui avait fait des jeunes, de la prévention et de la réduction des inégalités sociales de santé, des priorités. Mais derrière les annonces, toutes les promesses n'ont pas été tenues.

Même si le glas du tout curatif n'a pas encore sonné, la prévention a figuré en bonne place dans la loi de santé. Des mesures symboliques ont fait grand bruit comme le paquet neutre, l'expérimentation des salles de consommation à moindre risque (deux ont ouvert à Paris et Strasbourg), la suppression du délai de réflexion entre les deux premières consultations préalables à une IVG, ou le logo nutritionnel, adopté non sans bras de fer avec l'industrie. Les plans qui les sous-tendent (programme national de réduction du tabagisme, plan de lutte contre la drogue et les conduites addictives 2013-2017, plan d'amélioration de l'accès à l'IVG) ont été salués par les acteurs de la santé.

En outre, la loi Touraine a sanctuarisé la santé publique avec la création le 1er mai 2016 d'une agence dédiée à la santé des populations : Santé publique France, fusion de l'InVS, l'INPES et l'EPRUS. Les courbes ne s'inversent pas pour autant : les ventes de cigarettes comme la prévalence du tabagisme peinent à fléchir (encore 23 % des lycéens fument), le nombre d'IVG se stabilise autour des 220 000 par an depuis 2002, un tiers des Français sont en surpoids, et l'OMS table sur 25 % d'obèses d'ici 2030…

Pédopsychiatrie sinistrée 

Le secteur de l'autonomie a été en partie dépoussiéré grâce à la loi d'adaptation de la société au vieillissement, de décembre 2015, qui revalorise l'APA, ouvre le droit à une aide au répit et renforce les droits des usagers ; mais la refonte de la tarification des EHPAD a été troquée contre davantage de transparence. 

La psychiatrie espérait une grande loi consacrant la santé mentale. À la place, la loi de santé redessine son organisation à coup de GHT et de projets territoriaux et encadre l'isolement et la contention ; un conseil de la santé mentale et un comité de pilotage national sur la psychiatrie viennent d'être instaurés. Mais dans les hôpitaux, les psychiatres manquent, la pédopsychiatrie est sinistrée et l'autisme reste un terrain miné, après un troisième plan décrié par une partie de la profession. 

Si le 3e plan cancer 2014-2019 est bien engagé, le plan maladies neurodégénératives déçoit les associations. Quant à celui sur les maladies rares, il est toujours en cours de rédaction.  

La loi Leonetti-Claeys, qui ouvre le droit à une sédation profonde et terminale, sans aller jusqu'à l'« assistance médicalisée » promise par le candidat Hollande, n'a pas réconcilié les inconciliables pro-euthanasie et prolife. Les médecins s'impatientent de voir les retombées du plan triennal soins palliatifs. Quant aux questions relatives à l'assistance médicale à la procréation (ouverture à toutes les femmes, autoconservation ovocytaire, anonymat du don, filiation, financement), la virulence des polémiques autour du mariage pour tous semble en avoir eu raison.

Enfin, le quinquennat a échoué à restaurer la confiance dans la vaccination, et n'a pas trouvé de solution à l'intenable dualité entre vaccins recommandés et obligatoires.


Source : Le Quotidien du médecin: 9578