L'économiste de la santé Jean de Kervasdoué a évoqué mercredi, à l'occasion d'un débat du Café Nile, les transformations radicales de la pratique de la chirurgie, qui oblige les établissements de santé à penser autrement le recrutement médical.
L'expert, auteur d'un récent livre intitulé « Qui paiera pour nous soigner ? », a rappelé que la médecine française avait douze spécialités chirurgicales au sortir de la seconde guerre mondiale. Un demi-siècle plus tard, on en recense officiellement 58. « Mais sur le terrain, on tourne autour de 150 spécialisations et surspécialisations. Les Américains ont même dépassé les 200 ! », note Jean de Kervasdoué.
L'économiste illustre la « division de la médecine » par l'éclatement de la chirurgie générale, à l'origine du développement de la chirurgie orthopédique, qui a elle-même donné naissance à la chirurgie de la main, de l'épaule, du genou, etc. Cette « fragmentation » se réitère dans toutes les spécialités. « C'est pour cela que le Pr Brice Gayet n'aura pas un successeur en chirurgie viscérale à l'Institut Montsouris mais bien trois ! », lance Jean de Kervasdoué.
Pression économique
L'économiste estime au passage que la surspécialisation chirurgicale signe « la mort des petits hôpitaux », qui n'auront pas les moyens d'embaucher deux ou trois médecins au lieu d'un. « Plus on fragmente la médecine, plus la pression économique augmente pour les établissements », note-t-il.
Favorable à la fermeture des plus petits établissements, l'économiste a déploré que Marisol Touraine « ait refusé » de signer l'arrêt de mort de 10 % des services d'urgences français menacés en 2015. « Elle aurait dû le faire, regrette-t-il aujourd'hui. On parlait à ce moment-là d'une médecine d'urgence dans de petites structures dépourvues d'anesthésistes, ce qui est très dangereux. »
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