Se couvrir de la tête aux pieds

Raynaud : se protéger du froid et de l’humidité

Publié le 05/03/2009
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«  L’INTERROGATOIRE permet à lui seul de reconnaître un phénomène de Raynaud quand la patiente décrit la survenue paroxystique de trois phases de modifications de la coloration des extrémités  », souligne le Pr Eric Hachulla. D’abord survient la phase syncopale : les doigts deviennent blancs et engourdis. Puis une phase cyanique avec des accès de paresthésies et enfin la phase érythermalgique accompagnée d’une sensation de brûlure et parfois de douleurs. Classiquement, le pouce est respecté. Ce tableau est la traduction d’un spasme artériel intense et excessif lors d’une exposition au froid. Quand il est sur artères saines, on parle de phénomène de Raynaud idiopathique ou de maladie de Raynaud. Environ 5 % de la population générale en est affectée, prévalence qui varie en fonction des conditions climatiques.

La capillaroscopie indispensable.

Neuf fois sur dix il s’agit d’une femme. «  Sa survenue chez une femme de moins de 25 ans, l’ancienneté de son évolution (supérieure à cinq ans) et l’existence d’antécédents familiaux plaident très fortement en faveur d’une maladie de Raynaud. Mais des causes secondaires doivent être éliminées  », insiste le spécialiste. En cas de phénomène de Raynaud unilatéral, on écartera un syndrome du défilé thoracobrachial avec un écho-doppler du membre supérieur. Dans les formes bilatérales, on évoquera une cause médicamenteuse avec, en tête de liste, les anti-migraineux et les bêta-bloquants ( per os ou en collyres). On recherchera surtout chez la femme tabagique une maladie de Buerger en s’aidant de la manœuvre d’Allen. Cette technique consiste à comprimer les artères radiale et cubitale aux poignets avec ouverture et fermeture de la main. La main devient exsangue. On décompresse dans un premier temps l’artère cubitale. La recoloration de la main doit être homogène et se faire en moins de 3 secondes. La même manœuvre sera réitérée en lâchant l’artère radiale. On explore ainsi la vascularisation au poignet de l’artère radiale et cubitale isolément. Lorsqu’il existe une artérite digitale, la recoloration de la main est hétérogène. Les connectivites et la sclérodermie dominent un autre grand volet étiologique. «  Tout phénomène de Raynaud mérite une capillaroscopie » précise cet interniste. C’est un examen simple et anodin qui consiste à examiner sous microscope le lit de l’ongle recouvert d’une goutte d’huile. Son intérêt consiste à dépister une microangiopathie avec ou sans mégacapillaires. La présence de ces derniers oriente vers une sclérodermie, un syndrome de Sharp ou une dermatomyosite. «  En outre, je fais aussi systématiquement un bilan immunologique standard comprenant NFS, anticorps anti-noyau, électrophorèse des protéines. »

Quand aucune cause n’est retrouvée, on confirme le diagnostic de maladie de Raynaud. On peut rassurer la patiente sur la bénignité de sa maladie. Avec le temps, les crises sont plus rare pour parfois disparaître à la ménopause. Une prédisposition aux engelures est à connaître.

«  Le meilleur traitement consiste à se protéger contre le froid et l’humidité ». Il faut s’habiller chaudement de la tête aux pieds. Superposer des couches de vêtements est plus efficace que porter une seule couche pour garder sa chaleur que ce soit sur le corps ou les mains (gants de soie recouverts de gants en polaire). Privilégier les chaussures doublées en cuir, proscrire les baskets source d’humidité, porter des chaussettes chaudes, se couvrir le cou et la tête car l’organisme perd beaucoup de chaleur par le cuir chevelu.

Chaufferettes et gants.

Avant de sortir, ne pas toucher d’objets froids et mettre des gants. L’utilisation de chaufferettes pour les mains et les pieds est d’un grand secours. Elles sont vendues dans les magasins d’articles de sport. Avoir toujours une paire de gants dans son sac pour contourner les chocs thermiques des endroits climatisés et des secteurs frais des grandes surfaces alimentaires.

Éviter la caféine pour son effet vasoconstricteur et les médicaments contre le rhume qui contiennent de la pseudo-éphédrine. Enfin l’ arrêt du tabac est impératif.

Si ces mesures sont insuffisantes., on peut avoir recours aux inhibiteurs calciques qui diminuent la fréquence des crises (amlodipine 5 mg, diltiazem, buflomédil), mais il faudra toujours se protéger contre le froid.

(1) Service de médecine interne, hôpital Claude-Huriez, CHRU de Lille

 Dr MARIE-LAURE DIEGO-BOISSONNET

Source : lequotidiendumedecin.fr