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Dossier

Journées cicatrisation 2022

Ulcère veineux, objectif prévention

Par Dr Maia Bovard Gouffrant - Publié le 12/09/2022
Ulcère veineux, objectif prévention


GARO/ PHANIE

Après deux ans d’absence, les journées Cicatrisations de la Société française et francophone de plaies et cicatrisation (SFFPC) sont revenues fin mai à Paris pour un congrès avec l’Association européenne de la gestion des plaies (EWMA). L’accent a été mis sur la prévention : celle de la récidive des ulcères veineux de jambe, que de nombreuses nouveautés viennent faire progresser, mais aussi celle des escarres, avec le dépistage très précoce des zones à risque.

Les récidives des ulcères veineux de jambe (UVJ) sont fréquentes et doivent être prévenues avec d’autant plus de rigueur que dans de nombreux cas, des causes curables ou des facteurs favorisants peuvent être identifiés. On dispose maintenant d’un large choix de traitements endoveineux dans les insuffisances veineuses superficielles et l’insuffisance veineuse profonde peut dorénavant bénéficier d’une recanalisation.

Le traitement de base de l’insuffisance veineuse repose sur la réduction de l’hyper­pression par la perte de poids, l’exercice physique, la compression veineuse, associés à la correction des troubles staturaux et la prise en charge des varices superficielles et du syndrome post-thrombotique. Des progrès ont été réalisés à différentes étapes.

Varices, traiter la veine pour éviter les récidives

Le panel thérapeutique de l’insuffisance veineuse superficielle a ainsi considérablement évolué depuis 20 ans. Après la scléro­thérapie et le stripping sont apparus, dans les années 1980, des traitements endoveineux thermiques (radiofréquence, laser, vapeurs, micro-ondes). À partir de 2011, des traitements endo­veineux non thermiques ont suivi, avec des procédés chimiques, mécano­chimiques (technique MOCA, qui combine une abrasion mécanique via un cathéter spécial puis une sclérose chimique), physico­chimiques (technique LAFOS, qui associe traitement par laser endoveineux puis injection de mousse sclérosante), et enfin les HIFU (ultrasons focalisés de très haute intensité).

La chirurgie doit être réalisée sous anesthésie générale, avec un arrêt de travail de 3 à 4 semaines ; souvent douloureuse, son taux de succès est de 95 % à 5 ans. Les autres techniques peuvent être faites en ambulatoire, ne nécessitent pas ou peu d’arrêts de travail et permettent au patient de remarcher immédiatement.

L’échosclérothérapie peut être réalisée au cabinet du médecin sans anesthésie locale ; son intérêt est sa polyvalence puisqu’elle s’adresse à tous les types de veines ; son taux de succès est de 78 % à 5 ans. Elle est remboursée sauf si elle est uniquement à visée esthétique.

Les traitements endoveineux thermiques se font sous anesthésie locale, dite par tumescence (un liquide froid protège les tissus situés autour de la veine traitée). Non douloureux, leur succès est de 94 à 97 % à 5 ans. La radiofréquence est indiquée pour le traitement de la grande veine saphène, le laser pour la grande et la petite saphènes et les perforantes. Ces techniques sont remboursées, à l’inverse des procédés utilisant la vapeur d’eau ou les micro-ondes.

Les traitements endo­veineux non thermiques ne nécessitent pas non plus d’anesthésie locale mais ne sont pas remboursés. L’HIFU donne des résultats encourageants sur les troncs saphènes et les perforantes.

En 2018, l’étude randomisée EVRA, menée chez 450 patients et évaluant des traitements endoveineux en cas de reflux veineux superficiel avec ulcères veineux, a montré que la guérison était meilleure (85,6 vs 76,3 %) et le taux de récidive inférieur (11,4 vs 16,5 %) si le traitement était réalisé avant 2 semaines par rapport à un traitement différé après la guérison de l’ulcère ou après 6 mois en l’absence de cicatrisation. « Afin d’éviter la récidive des ulcères veineux, il est maintenant recommandé, au niveau européen et international, de prendre en charge rapidement les insuffisances veineuses superficielles avec des traitements endoveineux en première intention », insiste le Dr Monira Nou-Howaldt, (Montpellier).

Des stents pour les veines profondes

Concernant les veines profondes, le syndrome post-thrombotique complique 20 à 30 % des phlébites, surtout au niveau proximal. Le tableau est souvent très sévère avec des troubles trophiques, des ulcères très difficiles à cicatriser et concernant, souvent, des patients relativement jeunes. Le traitement repose sur la recanalisation veineuse afin d’améliorer la qualité de vie, la symptomatologie et de réduire l’incidence des ulcères de jambe et de leur récidive. On lève l’occlusion veineuse par une dilatation au ballonnet suivie par la pose d’un stent, technique sûre et efficace mais nécessitant un traitement par antithrombotiques et/ou anticoagulants pendant au moins 3 mois, associé à des soins locaux et au port de la contention.

La compression confortée

« L’intérêt de la compression dans le traitement des ulcères veineux, que la pratique recommandait, vient enfin d’être confortée par des données probantes », se félicite le Dr Sylvie Meaume, dermatologue (Paris). Une revue Cochrane de 14 études valables incluant 1 391 patients montre en effet que dans les ulcères veineux de jambe, le délai de guérison complète est plus court chez les personnes qui portent la contention vs celles n’en portant pas, avec probablement un score de douleur moyen plus faible et une qualité de vie supérieure.

Dispositifs autoajustables Sur le plan technologique, les bandes de compression à allongement court ont enfin obtenu un remboursement pour la réalisation d’un bandage multi-type dans l’ulcère veineux ou à composante veineuse principale. À côté des compressions classiques, il existe aussi maintenant des dispositifs auto-­ajustables, avec les systèmes WRAP qui permettent de moduler la pression appliquée de 20 jusqu’à 50 mmHg. Le principe repose sur l’existence de marques à différents endroits des bandes qui, en étant guidées par une réglette, peuvent être amenées et maintenues par des velcros au niveau du repère de la pression qu’on veut appliquer, l’ensemble étant enveloppé par une chaussette de contention homogénéisant la répartition des pressions. Ces dispositifs auto-­ajustables permettent aux patients de gagner en autonomie et de s’adapter à des morphologies atypiques. Ils sont réutilisables car lavables mais ils ne sont pas remboursés et sont relativement onéreux (entre 150 et 250 euros).