Impact des nouvelles règles de dépistage du diabète gestationnel sur la prévalence de cette affection, place des antidiabétiques oraux pendant la grossesse, spécificités du diabète gestationnel précoce. Le diabète de la femme enceinte a fait l’objet de nombreuses communications lors du récent congrès de la société française de diabétologie. Un sujet encore matière à de nombreuses discussions...
Décrit pour la première fois en 1909 par Sir J. Whitridge Williams, le diabète gestationnel (DG) suscite toujours le débat, comme en témoignent certaines communications du récent congrès de la Société francophone du diabète (SFD, Lille, 28-31 mars 2017).Les limites du dépistage
Concernant le dépistage, les recos du CNGOF et de la SFD parues en 2010 prônent un dépistage sur facteurs de risque incluant une glycémie à jeun puis une HGPO entre 24-26 SA avec un abaissement des seuils glycémiques pathologiques. Les premières données chiffrées après la mise en place de ces nouvelles guidelines montrent qu’elles ont été plutôt bien suivies puisque les trois quarts des femmes enceintes ont bénéficié d’au moins un dosage glycémique dans la période recommandée (75,7 %). Avec, en corollaire, une augmentation importante de la prévalence du DG qui suscite certaines réserves.
Entre 2011 et 2013, du fait de la baisse des seuils glycémiques pathologiques retenus, la prévalence du DG a augmenté de plus de 2 points. Selon un article paru dans la revue Gynécologie, Obstétrique et Fertilité, elle atteindrait désormais près de 14 %, « ce qui en fait l’une des pathologies les plus fréquentes au cours de la grossesse sans qu’aucune étude à large échelle n’ait à ce jour montré un bénéfice pour la santé des femmes et des enfants », regrettent les auteurs.
Autre bémol, près de la moitié des femmes n’ont pas eu de dépistage glycémique après l’accouchement, avec un fort gradient socio-économique. Sur ce point, la distinction entre DG précoce et tardif pourrait peut-être améliorer les choses en ciblant les femmes les plus à risque. Selon une étude présentée lors du congrès, le risque serait en effet plus marqué dans le sous-groupe de femmes ayant eu un DG précoce, chez celles avec une glycémie à jeun > 1,05 g/l ou en cas de recours à l’insulinothérapie. Par ailleurs, un DG précoce semble associé à un risque plus élevé de prééclampsie, d’hémorragie de la grossesse et de césarienne. Le DG tardif serait plus spécifiquement associé à un poids élevé pour l’ âge gestationnel, à la dystocie des épaules et à l’admission en soins intensifs et en réanimation.
Le score calcique, un « simple » scanner pour prédire le risque coronaire
Le scanner thoracique sans injection permet de dénombrer les calcifications présentes sur les artères coronaires et d’établir un score calcique. Partant du principe qu’une calcification équivaut à une plaque d’athérome, ce score permet une estimation fine du risque d’athérosclérose coronaire particulièrement intéressante chez les diabétiques de type 2. En effet, dans cette population, à risque accru de maladie coronaire et souvent peu symptomatique, il est difficile d’évaluer leur niveau de risque. Le score calcique fournit une idée précise et est de plus en plus couramment prescrit chez le diabétique de type 2.
Des ADO pendant la grossesse ?
Si le dépistage du DG suscite des interrogations, des questions se posent aussi de plus en plus quant à la meilleure façon de traiter les femmes concernées. Avec tout un débat sur l’intérêt potentiel des antidiabétiques oraux (ADO) dans cette situation.
Près de 35 % des femmes ayant un DG nécessitent un traitement pharmacologique pour maintenir un équilibre glycémique. Or « les femmes enceintes sont moins souvent compliantes et tolérantes à l’égard des traitements et notamment de l’insuline, souligne le Pr Marie Victoire (Le Kremlin-Bicêtre). D’où la tentation de prescrire des ADO ».
Cependant la littérature se révèle plutôt pauvre sur le sujet. Malgré leur ancienneté, les études in vivo et ex vivo sur la metformine et le glibenclamide
(sulfamide hypoglycémiant) ne sont pas si tranchées et, pour l’heure, aucune donnée n’existe en dehors de case-reports sur les analogues du GLP1, les inhibiteurs des DPP4 ou des SGLT2.
Les études in vivo actent toutes le passage placentaire de la metformine, avec des concentrations fœtales proches de celles de la circulation maternelle, « ce qui ne présume en rien de l’impact chez le fœtus, modère Sophie Gil (INERM UMRS 1139), du fait d’un volume de distribution, d’un métabolisme et de la maturité des organes totalement différents ». Les études ex vivo vont dans le même sens.
Le passage transplacentaire du glibenclamide est plus discuté. Jusqu’en 1991, les études ne repéraient aucun passage chez le fœtus. Près de vingt ans plus tard, les méthodes de dosage plus sensibles affirment le contraire : le transfert du glibenclamide oscillerait entre 50-70 % vers le compartiment fœtal.
Le microbiote dans le diabète : la preuve de concept
L’approche « probiotique » comme thérapeutique du diabète de type 2 et de l’obésité…, les chercheurs y croient, et les récentes découvertes les confortent dans leurs efforts.
Si la composition du microbiote compte, l’ensemble de ses métabolites aussi. En effet, le métabolisme bactérien, vis-à-vis de certains nutriments et constituants endogènes, crée un dialogue avec l’hôte. « Le rôle des métabolites issus du microbiote dans la régulation de fonctions clés intestinales serait essentiel, développe le Pr Nathalie Delzenne, (Louvain). En se liant à des récepteurs spécifiques, ces acides à chaînes courtes issus de la fermentation bactérienne de glucides (butyrate, etc.) participent à la sécrétion d’hormones régulatrices de la glycémie telle que le GLP1. Mais certains, comme le propionate, en gagnant la circulation systémique, peuvent aussi impacter la glycémie et l’équilibre glycémique ».
dysbioses Des chercheurs ont aussi mis en évidence l’existence de dysbioses associées à l’obésité et au risque de développer un diabète. D’où des tentatives pour repérer les bactéries clés vis-à-vis de la physiologie.
Un grand pas vient d’être franchi avec l’identification de l’une d’entre elles, une bactérie intestinale aux effets positifs pléiotrope, du moins chez la souris. Cette dernière, baptisée Akkermansia muciniphila, est la première bactérie du microbiote à avoir été, chez le modèle murin, en mesure d’intervenir dans la régulation de la « fonction barrière » de l’intestin, mais aussi dans l’immunité intestinale. Pour se servir d’A. muciniphila comme d’un outil thérapeutique, la bactérie a été pasteurisée et son ingestion a permis l’oxydation des graisses chez des souris nourries avec une diète « high fat ». Une diminution importante du poids corporel et de la masse grasse a été constatée. Ceci allait de pair avec une amélioration de la glycémie après un test de tolérance au glucose. Un essai chez l’homme est en cours chez des diabétiques à risque cardiométabolique, afin de découvrir si l’approche A. muciniphila peut impacter le métabolisme énergique.
Macrosomies et hypos sous glibenclamide
Les données divergent aussidans les études cliniques. Les plus anciennes (entre 2000 et 2010) sont plutôt rassurantes et suggèrent un devenir materno-fœtal à court terme sous glibenclamide ou metformine identique à l’insuline. Sur le glibenclamide, une étude a même fait le buzz en 2000, objectivant un effet similaire sur l’équilibre glycémique de la femme enceinte. Il n’en fallait pas plus pour que les Américains, puis les Anglais et les Canadiens l’autorisent dans le DG au même titre que l’insuline. En 2011, aux états-Unis, le glyburil (équivalent anglo-saxon du glibenclamide) a même supplanté l’insuline, avec une utilisation passée de 7,4 % au début des années 2000 à 64,5 %.
Mais une seconde vague de méta-analyses, en 2014 et 2015, tend à modérer ces ardeurs. Si ces récentes données sur la morbidité néonatale ne sont pas inquiétantes pour la metformine, en dépit d’une tendance sur la prématurité et d’une efficacité moindre une fois sur deux, ça n’est pas le cas du glibenclamide. L’une de ces méta-analyses fait état d’une augmentation du risque de macrosomie et d’hypoglycémie néonatale avec le glyburil. Pour cette raison, le NICE anglais, qui avait autorisé le glibenclamide, a fait depuis machine arrière. Deux études rétrospectives de cohorte de 2012 et 2014, portant sur près de 110 000 femmes ayant un DG, retrouvent ce surrisque de macrosomie et d’hypoglycémie avec, en sus, des signaux de détresse respiratoire chez le nouveau-né.
Récemment, une revue Cochrane soulignait l’absence de données pour utiliser les ADO en pratique clinique. Un avis partagé par le Pr Anne Wamberge (Lille) : « à la lumière des rares données dont nous disposons, nous n’avons pas le droit d’utiliser les ADO au cours de la grossesse. Le surrisque de macrosomie et d’hypoglycémie néonatale avec les sulfamides nécessite d’être exploré et le passage transplacentaire de la metformine fait réfléchir. »
L’essai français en cours INDAO (essai contrôlé multicentrique de non-infériorité du glibenclamide vs insuline dans le DG) apportera peut être quelques éclaircissements dans les prochains mois.
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Diabétoporose. Le risque fracturaire est augmenté au minimum de 30 % chez les diabétiques. Des anomalies du remodelage et une moindre qualité osseuse sont en cause, indépendamment de la densité minérale osseuse, d’où une ostéodensitométrie peu contributive.
Déclin cognitif et diabète, un lien à préciser. S’il est a priori souhaitable de traiter le diabète pour protéger le cerveau, le rôle de l’équilibre glycémique à court terme sur la fonction cognitive n’est pas encore démontré.
Hypoglycémies sévères, l’HbAC1 passe la main. Une HbAc1 basse a longtemps été considérée comme un facteur majeur d’hypos sévères dans le DT 1. La stabilité des insulines, les pompes et l’éducation thérapeutique ont changé la donne, et les déterminants sont plutôt désormais l’ancienneté du diabète et le nombre élevé d’hypos modérées hebdomadaires.