Dr E. Lecornet-Sokol : « La Fenarediam lance un grand programme d’innovation organisationnelle »

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Publié le 25/03/2021
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Un questionnaire a été adressé à tous les endocrinologues libéraux afin de faire le point sur l’activité et les pratiques professionnelles. Explications de la Dr Emmanuelle Lecornet-Sokol, secrétaire de la Fenarediam.

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LE QUOTIDIEN : Comment les endocrinologues libéraux organisent-ils leur activité au sein de leurs cabinets ? Et quels leviers faudrait-il utiliser pour améliorer les pratiques professionnelles ?

DR EMMANUELLE LECORNET-SOKOL : La Fédération nationale des associations régionales d’endocrinologie diabétologie et métabolisme (Fenarediam) s’est lancée dans ce chantier important. Nous souhaitons mettre en place un grand programme d’innovation organisationnelle. Nous avons adressé, en février 2021, un questionnaire à l’ensemble des endocrinologues libéraux. On en recense 850 en France et nous avons déjà reçu plus de 300 réponses.

Dans cet auto-diagnostic, de nombreux thèmes sont abordés afin d’évaluer la façon dont les endocrinologues libéraux exercent au quotidien : la prise des rendez-vous, le recours à la délégation des tâches, la participation à des Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS). Il faut trouver des moyens pour permettre à la profession de s’engager encore davantage, et mieux fluidifier l’action de ces réseaux locaux qui s’appuient sur une grande souplesse, sans pesanteurs hiérarchiques et avec une très bonne connaissance des territoires.

Nous allons aussi aborder l’utilisation de la téléconsultation la télésurveillance ou la télé-expertise. Notre spécialité est peu technique et particulièrement bien adaptée à ces consultations à distance. Depuis le début de la crise sanitaire, elle est d’ailleurs l’une de celles qui a le plus développé la téléconsultation [lire p. 8]. Cela a été particulièrement le cas dans les cabinets libéraux pour assurer le suivi des patients qui, pour différentes raisons, n’allaient plus à l’hôpital et étaient demandeurs de télémédecine. Il faut néanmoins garder à l’esprit que cela ne convient pas à tous les patients. Avec le Covid, nous en avons d’ailleurs perdu de vue certains et il va falloir lancer des pistes de réflexion pour les retrouver.

Quelles seront les suites données à cette consultation ?

À partir des réponses à ces questions, la Fenarediam va mettre en place six groupes de travail réunissant des endocrinologues libéraux de toute la France. Nous en tirerons six recommandations/préconisations : trois seront présentées en juin juillet et les trois autres à l’automne. Notre objectif, à terme, est d’améliorer les pratiques tout en renforçant nos collaborations avec les endocrinologues hospitaliers mais aussi les généralistes, les spécialistes et les pharmaciens ou les biologistes.

La volonté de la Fenarediam est aussi de continuer à encourager la participation des libéraux aux groupes de travail initiés par les tutelles. Nous sommes par exemple sollicités dans les travaux de la HAS sur le diabète de type 2, les dysthyroïdies ou l’échographie thyroïdienne. Nous avons participé au comité Levothyrox [lire aussi p. 18] pour assurer au mieux la transition entre l’ancienne formule du médicament et les autres thérapeutiques.

Quelle est votre position concernant l’accueil des internes au cabinet ?

La possibilité, inscrite dans la loi, d’accueillir et former des internes de spécialité dans nos cabinets doit être considérée. Nos collègues généralistes sont à l’origine de ce modèle de compagnonnage et ont déjà été rejoints par les pédiatres et les gynécologues. La demande des internes est réelle et enthousiaste, ce d’autant qu’une majorité se destine à la médecine libérale. De plus, non seulement une rémunération pédagogique existe, liée au statut de Maître de stage, mais les consultations assurées par l’interne une fois en autonomie font bien entendu l’objet d’une cotation (ce point figure explicitement dans la charte des stages et ne diffère pas de ce qui se passe à l’hôpital). Il faudra bien entendu arriver à convaincre. Outre le fait que cela donnerait de nouvelles lettres de noblesse à l’endocrinologie libérale, cela permet aussi le recrutement de futurs remplaçants, collaborateurs voire associés.

Un autre chantier, enfin, est celui de nos rémunérations. Selon les chiffres de la Carmf, nous sommes la seule spécialité à avoir un BNC (bénéfice non commercial) en dessous de 50 000 € par an. L’une des pistes, en dehors de la revalorisation intrinsèque des actes, et dans l’optique d’une harmonisation des pratiques avec nos voisins européens, est de pouvoir enfin intégrer des actes techniques à nos consultations : la France est l’un des derniers pays où les endocrinologues ne pratiquent pas couramment l’échographie et la cytoponction car, exception française, le couplage de leur cotation avec l’acte clinique n’est pas autorisé. Pourtant, en ces temps où la démographie médicale oblige à un exercice à flux tendu et où il vaut mieux ne pas multiplier les déplacements, cela serait une piste intéressante à tous niveaux et, malgré les apparences, potentiellement génératrice d’économie pour l’Assurance-maladie.

Exergue : Nous sommes la seule spécialité à avoir un BNC en dessous de 50 000 € par an

Propos recueillis par Antoine Dalat

Source : lequotidiendumedecin.fr