Troubles de la conscience et hypothermie

Hypoglycémie et acidémie chez un homme jeune

Publié le 01/06/2011
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UN SUÉDOIS de 26 ans est conduit aux urgences hospitalières pour des troubles de la conscience. La nuit qui a précédé l’installation de la pathologie, il a consommé un peu d’alcool. Vingt-quatre heures plus tard, il est découvert dans son lit inconscient et « froid ».

Aux urgences, sa glycémie est à 2,2 mmol/l (0,38 g/l) ; on lui administre du sérum glucosé à 30 % en I. V. Il est obnubilé et sa température est à 31°8 alors qu’il n’est pas allé dehors. On découvre une acidémie sévère (pH à 7,06). On suspecte une intoxication et le patient est rapidement transféré en soins intensifs.

Il existe une profonde acidose métabolique : pH à 6,87 ; PO2 à 11,3 kPa (84 mmHg), PCO2 à 7,23 kPa (53,8 mmHg), déficit de base à 26,8 mmol/l, lactates à 24 mmo/l. Ce qui conduit à entreprendre une hémodialyse. Au cours de la première heure, on administre : trométamol (300 ml), bicarbonates de sodium, phosphate d’hydrogène disodique, acétate Ringer (1 000 ml) ; et pendant les deux heures suivantes, trométamol (100 ml) et acétate Ringer (1 000 ml) . Par ailleurs, pendant la première perfusion de trométamol, on donne une mixture d’éthanol et de glucose.

À l’arrivée en soins intensifs, le taux d’éthylène glycol est à 20 mmol/l, ce qui conduit à porter le diagnostic d’intoxication par l’éthylène glycol. Mais les choses ne sont pas aussi simples. En effet, après une autre séance de dialyse avec perfusion d’éthanol et de glucose, le taux d’éthylène glycol est quasiment inchangé (19 mmoml/l). On demande alors à un autre laboratoire de recommencer le dosage avec une autre méthode Résultat : c’est le glycérol qui est élevé, pas l’éthylène glycol. Étant donné que le taux de glycérol s’accroît paradoxalement malgré les dialyses, on se dit qu’il doit y avoir une hyperproduction endogène de glycérol ; ce qui suggère que le patient a un déficit en glycérol kinase, très rare maladie récessive liée à l’X.

Normalement, le taux sanguin de glycérol n’excède pas 0,3 mmol/l (il est ici à 2,7) et l’élimination urinaire de glycérol est normalement nulle (elle est ici de 720 mg/dl).

Après un jeune prolongé, des taux de 8 mmol/l ont été enregistrés chez des patients ayant un déficit en glycérol kinase.

Aucune activité glycérol kinase n’a été détectée dans les fibroblastes de ce patient. Bien que cette maladie soit très rare, il peut être important de penser à un déficit en glycérol kinase dans le diagnostic différentiel d’une acidose inexplicable avec hypoglycémie chez les patients de sexe masculin, après avoir éliminé une intoxication par les méthodes de laboratoire appropriées.

Enikö Fodor et coll. New England Journal of Medicine du 5 mai 2011, pp. 1781-1782.

> Dr E. DE V.

Source : Le Quotidien du Médecin: 8975