LES RENDEZ VOUS DU QUOTIDIEN - Cœur et diabète

Patience et approche globale

Publié le 20/09/2011
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Crédit photo : S TOUBON

LE Pr BRUNO VERGES a tout d’abord rappelé qu’une importante méta-analyse a confirmé que le diabète multipliait par 2,32 le risque cardio-vasculaire. Par ailleurs, les ¾ des diabétiques meurent d’une maladie cardio-vasculaire. Pourtant les résultats d’une étude, ACCORD, ont relancé les débats sur le bénéfice macrovasculaire d’un contrôle strict de la glycémie. Une remise en cause largement relayée par la presse grand public et plusieurs sites Internet.

Pour le Pr B. Vergès le débat n’est pas fondé car l’analyse critique des grands essais d’intervention montre que le bénéfice est bien réel mais qu’il ne devient significatif qu’après plusieurs années et qu’un gain à court terme est réel si l’on prend en charge l’ensemble des facteurs de risque souvent associé au diabète (hypertension, dyslipidémie…).

La mémoire métabolique.

La célèbre étude UKPDS, ayant inclus près de 4 000 diabètes de type 2 nouvellement diagnostiqués a montré qu’un contrôle « intensif » (pas au sens actuel du terme fait remarquer le Pr Vergès) améliorant le contrôle glycémique ne parvenait pas à réduire significativement la fréquence des infarctus (-16 %, p = 0,052, à la limite du seuil de significativité).

Après la fin de UKPDS, les patients ont été suivis pendant 10 ans et l’on constate qu’alors que l’équilibre glycémique devient identique dans les groupes « standards » et « intensifs », les patients de ce dernier groupe voient leurs gains devenir significatifs pour les complications macro angiopathiques (-15 %, p‹0,014) et pour la mortalité (-13 %, p‹0,007).

Ainsi, constate le Pr Vergès, le contrôle glycémique permet de prévenir le risque cardio-vasculaire mais il faut de la patience et du temps. D’ailleurs les trois essais d’intervention les plus récents (ACCORD, ADVANCE et VADT) ont, en commun au-delà de différences méthodologiques très importantes, une durée plus courte (3,5 à 6 ans) et, justement, l’absence de réduction significative du risque macro-angiopathique. Tout juste peut-on noter, lors de la dernière année d’ADVANCE, la seule dont le critère de jugement principal (événements micro et macrovasculaires majeurs) ressort significativement un début d’effet protecteur. Alors même que la protection microvasculaire (-14 %, p = 0,014) et particulièrement rénale (-21 %, p = 0,006) apparaissent statistiquement significatives pendant la durée de l’essai.

Approche multifactorielle.

Si l’on veut assurer une prévention macroangiopathique à court terme, cela passe par une action multifactorielle agressive sur l’ensemble des facteurs de risque, comme l’a bien montré l’étude STENO-2 portant sur des diabétiques de type 2 micro albuminuriques. Il faut, en particulier, corriger énergiquement les anomalies tensionnelles et lipidiques, avec des seuils plus bas que chez les non diabétiques. Dans ces conditions on observe une réduction impressionnante des événements macrovasculaires, la protection microvasculaire étant assurée en ramenant le taux d’HbA1c à moins de 6,5 %. D’autres études sont venues confirmer ces données. En agissant sur la pression artérielle et le cholestérol on a un effet rapide, sans doute parce qu’on agit sur des mécanismes physiopathologiques susceptibles d’être modifiées à court terme, stress mécanique de l’hypertension sur la paroi artérielle, rôle du cholestérol dans la formation de la plaque et dans les processus inflammatoires. Alors que le diabète de type 2 favorise, par l’intermédiaire de la glycation, un phénomène de maillage de la paroi, celui-ci ne pouvant pas être stoppé rapidement, conclut le Pr Bruno Vergès.

(1) Réunion organisée avec le soutien institutionnel des laboratoires Servier.

Dr ALAIN MARIÉ

Source : Le Quotidien du Médecin: 9007