À partir de la cytoponction d’un nodule thyroïdien

Un test évite la chirurgie dans 90 % des cas

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Publié le 17/10/2019
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La ponction d’un nodule thyroïdien ne conclut à la nature bénigne ou maligne que dans 20 % des cas, conduisant souvent à l’intervention chirurgicale. Une équipe a développé un test qui permettrait d’éviter des chirurgies inutiles. La ponction est analysée sur la base d’une approche d’imagerie par spectrométrie de masse pour identifier le profil métabolique.

5 à 15 % des nodules de la thyroïde sont malins

5 à 15 % des nodules de la thyroïde sont malins
Crédit photo : Phanie

« Avec ce test de nouvelle génération, nous pouvons établir le diagnostic de cancer de la thyroïde de manière plus rapide et plus précise que ne le permettent les techniques actuelles. Nous pouvons le réaliser directement sur l’échantillon de la cytoponction à l’aiguille fine du nodule et ceci de façon beaucoup plus rapide que la méthode actuelle qui peut prendre entre 3 et 30 jours », précise le Dr James Suliburk, directeur de chirurgie endocrinienne au prestigieux Baylor College à Houston (Texas), qui a co-dirigé l’étude pilote publiée dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS)(1).

Si la majorité des nodules thyroïdiens sont bénins, 5 à 15 % sont malins. La cytoponction à l’aiguille fine, réalisée sous guidage échographique, est la pierre angulaire de l’évaluation de ces lésions nodulaires de la thyroïde. Toutefois, dans 20 % des cas, la cytoponction donne un résultat indéterminé et ne permet pas de conclure sur la nature bénigne ou maligne. Cela peut amener à une chirurgie thyroïdienne afin d’établir le diagnostic histologique. Les patients subissant une exérèse partielle de la thyroïde suivent alors souvent une hormonothérapie substitutive à vie.

Le nouveau test analyse le profil moléculaire de centaines de lipides et de métabolites dans l’échantillon de cytoponction de la lésion thyroïdienne via une approche d’imagerie par spectrométrie de masse utilisant la désorption/electrospray ou ionisation (DESI-MSI). Il identifie ainsi des signatures à visée diagnostique de cancers (carcinome folliculaire malin ou papillaire) ou de tissu tumoral de nature bénigne.

Prédiction diagnostique dans environ 90 % des cas

Les chercheurs ont travaillé sur l’identification de ces empreintes métaboliques diagnostiques pendant plus de deux ans en analysant des prélèvements tissulaires de 178 patients.Ils ont ensuite conduit une étude clinique pilote portant sur 69 échantillons de cytoponctions, obtenus prospectivement chez 57 patients ; 24 d’entre eux avaient un diagnostic pré-opératoire indéterminé par la cytologie de la ponction du nodule.

De façon remarquable, le nouveau test métabolique de la thyroïde prédit correctement le diagnostic dans environ 90% des cas et ce test aurait pu épargner la chirurgie inutile à 17 des 19 patients pour lesquels la chirurgie a posé le diagnostic de nodule bénin.

La meilleure précision du test permettrait ainsi d’éviter des interventions chirurgicales inutiles. « Si nous pouvions offrir un diagnostic plus précis et épargner aux gens une intervention chirurgicale inutile, nous pourrions améliorer le traitement des patients et réduire les coûts pour le système de santé », souligne le Pr Livia Eberlin, professeure de chimie et de médecine diagnostique à l’Université d’Austin (Texas) et co-signataire principale de l’étude. Ce test éviterait également l’anxiété du patient exposé à un résultat incertain.

L’équipe se prépare à débuter une étude internationale de validation du test (sur deux ans) qui portera sur les cytoponctions nodulaires obtenues auprès d’un millier de patients traités aux États-Unis, au Brésil et en Australie. Si les résultats sont validés, l’espoir est de voir cette technologie introduite en clinique pour offrir un nouvel outil diagnostique.

(1) R. DeHoog et al., PNAS, 10.7910/DVN/3B6NSQ, 2019

Dr Véronique Nguyen

Source : Le Quotidien du médecin