Un exercice nécessairement pluriprofessionel

Un tournant pour la diabétologie libérale

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Publié le 25/03/2019
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Crédit photo : Phanie

Quel peut être l'avenir de la diabétologie libérale ? Faut-il continuer à miser sur des cabinets isolés ou orienter l'exercice vers des structures pluridisciplinaires ? Et comment les diabétologues libéraux doivent-il se positionner face à la prochaine forfaitisation de la prise en charge du diabète dans laquelle ils ne seront – au moins dans un premier temps – pas impliqués ?

Voilà des questions, qui selon le Dr Pierre Serusclat, doivent être abordées franchement et sans tabous. « On doit s'efforcer de maintenir une place pleine et entière aux spécialistes libéraux dans la prise en charge des patients diabétiques. Et en faisant bien attention à ne pas nous engager dans un système de médecine à deux vitesses », indique le président du Conseil national professionnel d'endocrinologie, diabétologie et maladies métaboliques (CNPEDMM).

Le risque d'une médecine à deux vitesses

Dans un premier temps, les diabétologues libéraux doivent surtout réfléchir à leur place face à l'instauration de ces forfaits annoncés en septembre par la ministre de la Santé dans le cadre du plan « Ma santé 2022 » (lire page précédente). « C'est une initiative qui a priori est intéressante. La communauté diabétologique a activement participé à la réflexion. Mais on peut regretter que les spécialistes libéraux ne soient pour l'instant pas concernés. Il aurait été pourtant intéressant de développer ces forfaits dans les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) ou les maisons de santé, en y associant ces médecins mais aussi tous les acteurs de la prise en charge : autres spécialistes, infirmiers, diététiciens, moniteurs d'activités physiques adaptées, assistants sociaux, psychologues », estime le Dr Sérusclat, qui est donc plutôt favorable à une intégration des diabétologues libéraux dans cette forfaitisation.

« On pourrait estimer judicieux de rester à l'écart et de continuer de travailler à l'acte, prévient-il. Mais le risque serait de s'orienter vers une médecine à deux vitesses, avec les patients qui seraient prêts à assumer un reste à charge pour bénéficier d'un suivi privilégié avec un médecin diabétologue libéral, et les autres. »

Le métier doit évoluer

« La répartition des spécialistes libéraux sur le territoire n'est plus forcément en adéquation avec la prévalence du diabète. Les diabétologues libéraux se concentrent dans les zones urbaines et on en trouve peu dans les territoires ruraux », indique le Dr Sérsuclat, en précisant que, dans l'immense majorité des cas, ces médecins exercent encore majoritairement dans des cabinets isolés, soit seuls, soit avec un ou deux confrères. « Certains travaillent dans des maisons de santé ou des groupes pluridisciplinaires avec des cardiologues ou des ophtalmologistes. Mais cela reste encore rare. Pourtant, c'est sans doute dans cette direction que doit aller la diabétologie libérale. À titre personnel, je ne pense pas que l'exercice isolé ait beaucoup d'avenir dans notre spécialité. Il faut que le diabétologue libéral sorte de son cabinet et travaille encore davantage avec tous les professionnels intervenant dans la prise en charge des patients diabétiques, tant au niveau du soin que de l'éducation thérapeutique. Cela peut passer par une intégration des diabétologues libéraux à des structures pluriprofessionnelles ou par une solution intermédiaire où, via la forfaitisation, l'expertise des diabétologues serait exportée dans des CPTS ou des maisons de santé pluriprofessionnelles. »

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Je ne pense pas que l’exercice isolé ait beaucoup d’avenir dans notre spécialité

Entretien avec le Dr Pierre Sérusclat, président du Conseil national professionnel d’endocrinologie, diabétologie et maladies métaboliques (CNPEDMM).

Antoine Dalat

Source : Bilan Spécialiste