Le débat semblait enterré, il n’en est rien. L’équipe canadienne dirigée par George Thanassoulis relance la controverse concernant la prescription de statines en prévention de la sténose aortique. Leurs résultats issus de très larges cohortes, le consortium CHARGE (n = 6 942), incluant la célèbre étude Framingham, et l’étude « Malmö diet and Cancer » (MDCS) (n = 28 461), contredisent les essais randomisés précédents, qui concluaient à l’absence d’effets bénéfiques.
L’équipe de Montréal dirigée par George Thanassoulis à l’Université McGill a retrouvé une association entre des traits de susceptibilité génétique à l’hypercholestérolémie LDL et la survenue de sténose aortique. La prévalence dans les cohortes CHARGE était de 32 % (n = 2245), l’étude MDS a dénombré 473 nouveaux cas au cours des 16,1 ans de suivi, soit 17 pour 1 000 participants. Le LDL cholestérol (LDL-C) augmentait de 28 % l’incidence de la sténose aortique. Quant aux scores de risque génétique, ils étaient aussi associés significativement à un risque augmenté. Aucun effet en revanche n’a été observé avec le HDL-cholestérol (HDL-C) ni les triglycérides (TG).
Malgré des essais randomisés décevants
Si le LDL-C est un facteur de risque important de valvulopathie aortique dans les études épidémiologiques, les statines ne se sont pas révélées efficaces pour ralentir la progression de la maladie chez des patients ayant une lésion aortique avancée. Les chercheurs ont lancé leur étude en partant de l’hypothèse que les choses pourraient être différentes si le LDL-C jouait un rôle au stade précoce.
Pour vérifier leur théorie, l’équipe a choisi d’analyser l’association entre la sténose aortique et des scores de risque génétique incluant des variants multiples. L’approche utilisée, dite de « randomisation mendélienne », a pour objectif d’évaluer la causalité entre des biomarqueurs et diverses situations cliniques. De manière plus précise, les chercheurs ont voulu déterminer dans quelle mesure le bilan lipidique était associé une sténose valvulaire débutante infraclinique et à l’incidence clinique de la sténose aortique.
Des facteurs prépondérants en phase tardive
Leur hypothèse, confortée par les résultats obtenus, trouve une justification dans le fait que les essais randomisés ont inclus des patients âgés, ayant une maladie valvulaire connue, de gravité modérée à sévère. Selon les auteurs, « une fois la calcification et le remodelage bien établis, d’autres facteurs que le LDL-C, comprenant les forces hémodynamiques et des facteurs procalcifiants », prennent le dessus et « deviennent plus importants pour la progression ». De plus, une étude parue dans « Science » en 1999 suggère même que les statines favoriseraient la calcification dans les valvulopathies au stade avancé.
Le LDL-C pourrait jouer un rôle dans la phase précoce de calcification et de minéralisation, « via la formation de microcristaux de cholestérol qui agissent comme le nid de la future calcification, et aussi via les particules de LDL oxydées, un médiateur puissant proinflammatoire et prooxidant ». Tous ces arguments plaident pour une réévaluation de l’intérêt des statines en prévention de la maladie aortique valvulaire. Aucun traitement médical ne s’est révélé efficace à ce jour pour arrêter le processus, ni même le ralentir.
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