Arthrose du genou

Prendre en compte la fragilité du patient

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Publié le 13/05/2019
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gonarthrose

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Crédit photo : PHANIE

« La gonarthrose, pathologie très fréquente chez le senior touche environ 1/3 des plus de 65 ans », indique le Pr Hubert Blain, responsable du pôle de gériatrie au CHU de Montpellier.

En période de crise, le traitement passe par une mise au repos de l’articulation. « Pour que ce repos n’entraîne pas un déconditionnement musculaire avec perte d’autonomie, prescrire en parallèle, des séances de kinésithérapie pour entretenir le reste du corps », indique le médecin. En période de calme, la pratique d’une activité physique adaptée voire de séances de renforcement musculaire en kinésithérapie permet de prévenir les poussées arthrosiques. L’évaluation podologique est également capitale : « un chaussage adapté avec, si besoin, des semelles plantaires thermoformées, limite l’impact des altérations d’ampliation articulaire du genou et soulage la hanche et le dos », précise-t-il. Le port d’une genouillère ou de bandes de tapes améliore la proprioception peut aider le patient à limiter les traumatismes qu’il inflige à son genou. La canne, peut soulager l’articulation, à condition d’adapter sa longueur pour ne pas risquer de modifier les équilibres et induire d'autres douleurs.

Tramadol surutilisé

Les infiltrations d’acide hyaluronique peuvent stabiliser certains patients en cas d’arthrose fémoro-tibiale. Sont à éviter chez les seniors fragiles, les anti-inflammatoires par voie générale (nombreux effets indésirables), et les traitements de fond antiarthrosiques d’action lente (efficacité non démontrée). Les topiques anti-inflammatoires peuvent être utiles « à condition de s’assurer que le patient n'est pas insuffisant cardiaque ou rénal sévère », ajoute le Pr Blain. Quant aux antalgiques, « ils limitent les informations proprioceptives et peuvent amener le malade à être plus traumatisant pour son articulation », fait-il remarquer. Le tramadol favorise la rétention vésicale d’urine, la constipation, peut entraîner un fécalome et une accoutumance. Il est également confusiogène en cas d’encéphalopathie vasculaire sous-jacente. « Avant toute prescription, s’assurer par une évaluation gérontologique simple (interrogatoire sur les antécédents et test de l’horloge, par ex.) que le patient n’a pas de troubles cognitifs ou d’épilepsie et vérifier qu’il n’y a pas de risque d’interactions avec d’autres traitements, notamment avec les antidépresseurs sérotoninergiques », insiste le praticien.

Prothèse : un « oui mais »

Lorsque l’évaluation fonctionnelle et douloureuse - et non uniquement l’examen radiologique- indiquent que le patient perd de l’autonomie, la pose d’une prothèse peut être envisagée. À condition que le geste chirurgical soit effectué suffisamment tôt et avec une évaluation globale du rapport bénéfices/risques chez le patient. « Chez un malade avec des troubles cognitifs sous-jacents, la chirurgie peut amener un bon résultat fonctionnel mais risque d’entraîner une dégradation de l’état cognitif voire une grabatisation du patient », insiste le médecin. Quel que soit le traitement, il est utile lors de la prise en charge d'un patient âgé fragile que les différents praticiens travaillent avec le gériatre. « Il aidera, par une approche globale du patient tenant compte des pathologies chroniques sous-jacentes, à anticiper le rapport bénéfices-risques des pistes thérapeutiques envisagées et à privilégier les approches médicamenteuses et non médicamenteuses les plus adaptées pour prévenir les effets indésirables liés aux traitements », conclut le Pr Blain.

Stéphany Mocquery

Source : Le Quotidien du médecin: 9749