Au-delà des idées reçues

Agir contre les troubles trophiques

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Publié le 31/01/2019
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ménopause trophique

ménopause trophique
Crédit photo : BURGER/PHANIE

Le syndrome génito-urinaire de la ménopause (SGUM) a une prévalence globale de 27 %, et elle est probablement sous-estimée. Il associe une symptomatologie vulvovaginale, sexuelle et urinaire. Ces troubles trophiques peuvent se manifester très tôt, parfois dès la préménopause et vont s'aggraver avec l'âge. Or les femmes en parlent peu, et les praticiens craignent souvent d'aborder ce domaine complexe.

Il faut s'intéresser en premier à l'hygiène de vie – arrêt du tabac, bonne hydratation, maintien d'un poids de forme ou réduction pondérale, activité physique – déconseiller les produits lavants parfumés ou irritants et… maintenir des rapports sexuels réguliers.

Des œstrogènes locaux avant tout

« L'œstrogénothérapie locale est le traitement le plus efficace du SGUM, avec une réduction de plus de 90 % de la dyspareunie, une amélioration de l'élasticité vaginale et du pH. Elle permet de retrouver une sexualité régulière, laquelle entretient la trophicité vaginale », souligne la Dr Brigitte Letombe, gynécologue médicale et obstétrique à Lille. Les œstrogènes locaux (OL) favorisent en effet la prolifération épithéliale vaginale, et agissent aussi au niveau de l’urètre et de la vessie.

L'atrophie vaginale entraîne une dysbiose, qui favorise l'ascension bactérienne dans les voies urinaires, d'où les cystites plus fréquentes à la ménopause. Les OL préviennent les infections urinaires récidivantes, réduisent l'incontinence urinaire (RR = 0,74) et diminuent la symptomatologie liée à l'hyperactivité vésicale et l'urgenturie.

À noter, l'association de probiotiques aux OL exerce une action synergique vis-à-vis des infections urinaires, en diminuant le pH de l'urètre et du vagin ainsi que la colonisation par les entérobactéries. Soulignons en revanche que l'œstrogénothérapie systémique n'a pas d'effet sur les signes urinaires et pourrait même majorer l'incontinence de stress.

Les produits disponibles en France, sous forme d'ovules, de crèmes, de gélules, sont à base de promestriène ou d'estriol et ont tous la même efficacité. Le problème est celui de l'observance au long cours, du fait de leur utilisation quotidienne et des écoulements qu'ils provoquent.

Depuis 2016, on dispose de l'Estring (utilisé depuis plus de 15 ans au Quebec), un anneau vaginal délivrant de l'estradiol et mis en place pour 3 mois. Il n'entraîne ni écoulement ni inconfort… mais il n'est pas remboursé par l'Assurance Maladie !

Lubrifiants et hydratants

Les lubrifiants vaginaux sont utiles lors des rapports sexuels, mais n'ont aucun effet sur le long terme. Ils peuvent aggraver les problèmes de vaginoses et certains peuvent contenir des substances irritantes ou allergisantes telles que le propylène glycol, les conservateurs, les parabènes.

Les hydratants ont des compositions très diverses, afin d'améliorer l'élasticité vaginale et le pH, avec une efficacité satisfaisante sur l'atrophie vulvovaginale et l'incontinence urinaire et dépourvus d'effets indésirables. Inconvénient : ils doivent être utilisés au long cours de façon pratiquement quotidienne. Ils sont intéressants chez les femmes qui ne peuvent ou ne veulent pas prendre des traitements hormonaux, ou encore en préparation aux OL, lesquels peuvent être irritants à l'initiation, sur une muqueuse atrophique.

De nouvelles thérapies bientôt disponibles ?

La DHEA intravaginale semble intéressante par son effet œstrogénique et androgénique local sur la dyspareunie, l'atrophie vulvovaginale et les symptômes génito-urinaires. Commercialisée aux États-Unis depuis 2017, elle a l'AMM européenne depuis janvier 2018 et pourrait être disponible en 2019.

Autre molécule dans les pipelines, l'ospémifène est un SERM (modulateurs sélectifs des récepteurs estrogène) pris par voie orale, avec un effet œstrogénique au niveau vaginal mais neutre ou minime au niveau des organes oestrogéno-dépendants comme l'endomètre. Il pourrait avoir un intérêt chez les femmes ayant eu un cancer du sein mais n'est pas disponible en France.

Communication de la Dr Brigitte Letombe, gynécologue médicale et obstétrique à Lille

Dr Maia Bovard-Gouffrant
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Source : Le Quotidien du médecin: 9720