Les progrès de l’oncogénétique

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Publié le 07/10/2022
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Sur les 58 000 cancers du sein survenant chaque année en France, environ 10 à 20 % surviennent dans un contexte d’agrégation familiale. Pour démontrer la composante héréditaire du cancer, il faut montrer que la patiente est porteuse d’une mutation dans l’un des gènes majeurs de prédisposition (BRCA1, BRCA2, PALB2) ou dans d’autres gènes impliqués plus modérément dans la prédisposition héréditaire au cancer du sein.

L’aspect héréditaire n’est aujourd’hui démontré que dans 12 % à 15 % des cas explorés. « Ainsi, l’explication moléculaire n’est aujourd’hui retrouvée que dans un cas sur six au maximum, pas davantage. À l’heure actuelle, les techniques d’analyse employées et la façon de réaliser le diagnostic moléculaire ne sont probablement pas encore optimales », déplore le Pr Nicolas Sevenet, responsable du laboratoire de génétique moléculaire à l’Institut Bergonié, Bordeaux. Mais la recherche ne cesse de développer de nouvelles technologies, pour permettre de mieux décrire les altérations moléculaires.

Lors des premières consultations d’oncogénétique, les patientes sont reçues par le spécialiste ou par l’intermédiaire d’un conseiller en génétique (titulaire d’un master 2 portant le même titre). « Ce métier s’est beaucoup développé ces dernières années, explique le Pr Sevenet. Ces professionnels de santé effectuent l’interrogatoire de la patiente et retracent toutes les atteintes familiales connues. » Lorsque la patiente rentre bien dans les critères de prise en charge en oncogénétique, le médecin lui propose une enquête génétique.

Après avoir donné son consentement de façon libre et éclairée, la patiente bénéficie d’un prélèvement sanguin pour rechercher dans l’ADN leucocytaire la présence d’une mutation dans les gènes du cancer du sein ou de l’ovaire. « Le résultat du test génétique étant définitif, une prise en charge psychologique est souvent proposée, souligne le spécialiste. Ces analyses s’effectuent la plupart du temps sans urgence, une fois la phase de traitement terminée. »

Dans le cas où des mutations sont identifiées, un suivi radiologique et des attitudes chirurgicales spécifiques sont proposées et validées en réunion de concertation pluridisciplinaire. Chez les patientes porteuses d’une mutation BRCA1 ou BRCA2 par exemple, le risque de nouveau cancer du sein est plus élevé. Le chirurgien pourra alors notamment opter pour un geste élargi (mastectomie plutôt que tumorectomie). Il existe également une indication d’analyse à visée théranostique. Le fait de détecter une mutation BRCA1 ou BRCA2 induit l’adjonction d’une thérapie ciblée par inhibiteur de Parp (olaparib) au traitement classique du cancer du sein ; ce traitement ayant démontré une diminution du risque de rechute dans ce contexte particulier.

Entretien avec le Pr Nicolas Sevenet (Bordeaux)


Source : Le Quotidien du médecin