Tuberculose résistante : une avancée majeure avec le protocole optimisé BPaL

Publié le 01/09/2022
Article réservé aux abonnés

Crédit photo : PHANIE

Le nouveau schéma médicamenteux BPaL développé ces dernières années contre la tuberculose multirésistante était freiné par un taux élevé d'effets indésirables liés au linézolide, l'un des trois antibiotiques utilisés.

Une étude publiée dans le « New England Journal of Medicine » change la donne : elle démontre que la posologie du linézolide peut être réduite de moitié sans diminuer significativement l’efficacité du traitement.

Le BPaL, qui combine de la bédaquiline, du prétomanide et du linézolide, a été considéré comme une avancée majeure depuis son approbation par la Food and Drug Administration (FDA) aux États-Unis en 2019.

La recherche en 2020 a montré que le régime BPaL guérissait plus de 90 % des patients, mais qu'il y avait un taux élevé d'effets indésirables liés au linézolide, notamment des douleurs neuropathiques ou une myélotoxicité.

Le récent essai impliquant 181 participants atteints de tuberculose résistante - ultrarésistante (c'est-à-dire résistante à la rifampicine, à une fluoroquinolone et un à aminoside, XDR en anglais), pré-ultrarésistante (c’est-à-dire résistante à la rifampicine et soit à une fluoroquinolone ou à un aminoside) ou une forme résistante à la rifampicine (absence de réponse ou arrêt de la seconde ligne en raison d'effets indésirables) - a été mené en Russie, en Afrique du Sud, en Géorgie et en Moldavie - des pays où les taux de tuberculose sont élevés.

Six mois de traitement

Il en ressort que si 1 200 milligrammes de linézolide sur six mois fonctionnent à 93 %, ce taux se maintient à 91 % quand la dose est réduite de moitié, à 600 milligrammes. Dans cet essai, le nombre de participants atteints de neuropathie périphérique est passé de 38 % à 24 %, tandis que le taux de myélosuppression est passé de 22 % à 2 %.

« C’est le début de la fin de la tuberculose pharmacorésistante, déclare l’autrice principale de l’étude, Francesca Conradie de l'Université du Witwatersrand en Afrique du Sud. Plus vous traitez rapidement la tuberculose de quelqu'un, moins il est contagieux – c'est comme le Covid à bien des égards. »

Moins de médicaments à avaler

Il est en outre plus facile pour les patients de prendre BPaL : alors que les précédents protocoles pouvaient impliquer 23 pilules par jour et jusqu’à 14 000 pilules au total sur deux ans, BPaL consiste pour sa part en cinq pilules par jour - moins de 750 sur six mois.

Pour Nataliia Lytvynenko, qui a supervisé les traitements BPaL en Ukraine, la quantité plus gérable de médicaments facilite la poursuite du traitement pour les patients qui ont été déplacés à cause de la guerre.

L'Organisation mondiale de la santé a fait savoir plus tôt cette année qu'elle mettrait bientôt à jour ses directives pour recommander à la plupart des patients atteints de tuberculose résistante aux médicaments d'utiliser BPaL avec 600 milligrammes de linézolide. En 2020, l'agence onusienne ne recommandait le BPaL que dans des conditions de recherche opérationnelle.

Il s'agit là d'« avancées majeures », ont souligné deux experts dans le domaine, non impliqués dans l'étude. Le traitement BPaL « est l'un des progrès déterminant de la recherche scientifique sur la tuberculose de ce siècle », ont ainsi écrit Guy Thwaites de l'université britannique d'Oxford et Nhung V. Nguyen du Programme national de lutte contre la tuberculose du Vietnam dans un éditorial du « New England Journal of Medicine ».

Ces résultats surviennent alors que la pandémie de Covid avait fait craindre un certain nombre de freins dans la lutte contre la tuberculose, la plus grande cause de mortalité infectieuse avant l'arrivée du Sars-CoV-2, avec 1,5 million de décès chaque année. Environ 5 % des nouveaux cas sont résistants aux antibiotiques prescrits, ce qui les rend difficiles à traiter.

I.D. avec AFP

Source : lequotidiendumedecin.fr