COMMENT DONNER le bon traitement à temps si l’on ne sait pas ce que l’on cherche ? « Le pronostic des encéphalites peut être effroyable, explique au " Quotidien " le Dr Alexandra Mailles, InVS et co-auteur d’une étude publiée en 2009 sur l’épidémiologie des encéphalites infectieuses en France. La rapidité de la prise en charge est un facteur déterminant de la mortalité. Savoir ce qu’il faut chercher pour le diagnostic et savoir ce qu’il faut traiter avant l’obtention des résultats, voilà ce à quoi tendent nos descriptions épidémiologiques d’un côté et de l’autre de la Manche. Nous avons travaillé ensemble, puisque nous montions nos études en même temps. » Publiée cette semaine dans le « Lancet Infectious Diseases », l’étude britannique dirigée par le Dr Julia Granerod a ainsi analysé les données de 203 patients tous âges confondus, ayant une encéphalite entre octobre 2005 et novembre 2006. « Alors qu’en France, nous nous sommes limités aux encéphalites de cause infectieuse, nos collègues britanniques, qui ont commencé un peu plus tard, ont pu intégrer dans leur analyse une donnée toute nouvelle à l’époque : l’identification des encéphalites origine immunitaire. Et pour ce qui est des causes infectieuses, nous obtenons des résultats similaires, c’est plutôt rassurant ! ».
Tiercé HSV, VZV, BK.
Dans l’étude britannique, dans moins de la moitié des cas (42 %), une cause infectieuse est identifiée, pas beaucoup moins qu’en France en 2009 (52 %). « Nous retrouvons le tiercé gagnant de notre étude en France, le virus herpes simplex en tête à 19 %, puis le virus varicelle zona à 5 % et la tuberculose à 5 %, commente la spécialiste. La mise en évidence de la tuberculose nous avait aussi beaucoup étonnés. C’est une notion importante, car la mortalité est particulièrement élevée. Il faut y penser à la rechercher et à la traiter. Il n’y a pas que des causes virales même si elles sont majoritaires ! Nous avions identifié aussi des listérioses et des mycoplasmoses, les Britanniques ont isolé quelques cas de Coxiella et de streptocoques. Il n’en reste pas moins que près d’un quart des encéphalites peut être potentiellement traité par aciclovir. » L’encéphalopathie était décrite par des troubles de la conscience évoluant depuis plus de 24 heures, avec au moins deux de symptômes suivants (fièvre ≥ 38 °C ; convulsions ou des signes neurologiques d’atteinte focale ; pléiocytose du LCR, soit › 4 GB/microlitre ; tracé EEG évocateur ; anomalies à l’IRM).
À médiation immune.
Dans l’étude britannique, les encéphalites d’origine immunitaire représentent un cinquième des cas (21 % ; n = 42). « L’équipe de Julia Granerod a décrit une nouvelle entité avec les causes d’origine immunitaire, poursuit le Dr Mailles. C’est un champ diagnostique, thérapeutique et pronostique complètement nouveau. » La dénomination d’origine immunitaire regroupe différentes entités : principalement les encéphalomyélites aiguës disséminées (ADEM en anglais), mais aussi des encéphalites auto-immunes à auto-anticorps dirigés contre la membrane des neurones (antirécepteurs NMDA, antiVGCK) ou d’autres causes plus rares (vascularites, scléroses en plaques, paranéoplasiques). «Ces encéphalites à médiation immune sont très confondantes, explique le Dr Mailles. Elles se présentent comme celles d’origine virale, peut-être avec un aspect un peu psychiatrique avec des stéréotypies du visage, mais diffèrent complètement pour le traitement et le pronostic. Un traitement immunomodulateur est nécessaire au plus tôt. »
Si la recherche virologique, en particulier d’HSV et de VZV, est maintenant bien connue des médecins, la recherche de la tuberculose l’est moins. De même, la recherche d’une cause immunitaire n’est pas bien connue. «Il n’existe pas encore de recommandations françaises pour la prise en charge des encéphalites. Les seules disponibles sont américaines rédigées par l’Infectious Disease Society of America. Ces nouvelles données soulignent bien la nécessité de les actualiser. » Les séquelles à long terme des encéphalites sont aussi assez mal connues, probablement comparables à celles des traumatisés cérébraux. « Le handicap chez les survivants est très certainement sous-estimé », fait-elle remarquer.
The Lancet Infectious Diseases, publication en ligne du 18 octobre 2010.
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