Halte aux idées reçues sur deux sujets d’intérêt

Publié le 22/06/2011
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Pour beaucoup de personnes, « le sport fait maigrir » et il est souvent recommandé de pratiquer une activité physique pour perdre du poids et maintenir sur le long terme la perte de poids obtenue. Cette croyance est basée sur des études d’observation menées il y a quelque 20 à 30 ans et qui montraient une association inverse entre le niveau d’activité physique et la prise de poids. Mais qu’en est-il réellement. Le sport pratiqué seul permet-il de perdre du poids et de maintenir cette perte à long terme ? La perte de poids est-elle majorée, puis maintenue, lorsque le régime est associé à la pratique de sport que lorsqu’il est réalisé seul ?

L’analyse de la littérature a porté sur les études interventionnelles randomisées et contrôlées, menées chez des patients en surpoids et obèses et comparant la pratique d’un sport (activité physique programmée avec un objectif de durée et de fréquence et non pas simple activité physique quotidienne) à l’absence de toute prise en charge, ou comparant sport et régime à régime seul. Trois méta-analyses répondaient aux critères de sélection, qui imposaient notamment une durée de suivi supérieure à trois mois. Elles colligeaient les données de vingt-deux études comparant sport à absence de toute prise en charge, et celles de quarante-cinq études comparant sport et régime à régime seul.

Impact modeste

Comparativement à l’absence de toute prise en charge, la pratique du sport fait perdre 2,4 kg en moyenne (0,7 kg/m2), perte qui n’est pas majorée en cas de pratique sportive plus intense. Quant à l’association sport et régime, elle fait perdre en moyenne 1,14 kg (0,5 kg/m2) de plus que le régime seul. Ainsi, l’impact du sport sur la perte de poids reste modeste chez les sujets en surpoids ou obèses. Cela ne veut pas dire pour autant que l’activité physique est inutile, mais que les messages doivent être orientés sur ses bénéfices sur la santé plutôt que sur la perte de poids.

Deuxième grande idée reçue : certaines personnes disent « grossir sans manger ». Grossir malgré de faibles apports caloriques implique un ralentissement du métabolisme de base, puisque ce dernier est responsable d’environ les trois quarts de la consommation calorique. C’est en fait une étude menée chez les Indiens Pima en 1988, ayant mis en évidence une relation inverse entre la prise de poids et un métabolisme basal faible, qui a conduit à émettre cette hypothèse. Mais les études ultérieures n’ont pas pu confirmer ces résultats, même si chez certains patients obèses le métabolisme de base peut être anormalement ralenti après une perte de poids. La littérature sur les relations entre métabolisme de base et obésité est assez restreinte, et les données présentées sont issues de cinq essais, une métaanalyse et une revue de la littérature. Selon ces études, le métabolisme de base est plus élevé chez les sujets obèses que chez les sujets sans surpoids. De plus, ce métabolisme de base ne paraît pas être un facteur prédictif du risque d’obésité. La métaanalyse souligne toutefois que les sujets ayant retrouvé un poids normal après un régime ont un métabolisme de base réduit de 3 à 5 % comparativement à ceux ayant toujours été minces.

Si le métabolisme de base ne semble pas en cause, comment expliquer une prise de poids chez une personne ne mangeant que très peu ? Une réponse vient du travail réalisé par Steve Heymsfield qui a utilisé des traceurs isotopiques pour évaluer la consommation réelle : certains patients obèses, qui étaient absolument convaincus de n’absorber que 1 000 kcalories par jour, en consommaient en fait le double. Ainsi, plus qu’un métabolisme basal ralenti, les erreurs d’appréciation de la consommation expliquent très probablement la prise de poids chez certains patients ne déclarant que peu manger.

D’après la communication du Dr Rodi Courie. « Idées reçues sur la nutrition : fondement et analyse critique ».

Dr Isabelle Hoppenot

Source : Nutrition