Dépistage de la BPCO des éleveurs

Un questionnaire tient enfin compte de l’exposition professionnelle

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Publié le 16/10/2017
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BPCO

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Crédit photo : PHANIE

La BPCO est dans 80 % des cas liée au tabac. Ailleurs elle peut être attribuée à l’environnement, notamment professionnel (dont agricole).

Pour développer la maladie, la notion de sensibilité individuelle intervient. Seulement 20 % des fumeurs développent la maladie. Si la BPCO agricole n’est malheureusement pas encore reconnue comme maladie professionnelle, le risque de BPCO varie énormément d’une profession agricole à l’autre. Les éleveurs porcins, aviaires ou bovins travaillant dans de petites exploitations artisanales confinées sont exposés de façon importante et répétée aux poussières végétales (spores développées dans le foin…), animales (poussières d’excréments etc.), minérales et à l’ammoniaque. « Ces éleveurs ont un risque 2 à 3 fois plus important de BPCO que la population générale, et ce indépendamment du tabac », indique le Pr Degano. À l’opposé, les producteurs céréaliers, s’ils sont exposés aux pesticides, le sont peu aux poussières minérales, végétales ou animales et n’ont pas de sur-risque de BPCO. « Dans les petites exploitations, les éleveurs ont un risque non négligeable de développer des maladies pulmonaires parmi lesquelles la BPCO. Ils doivent absolument se protéger avec des masques appropriés pendant les périodes où l’exposition aux particules est majeure et s’ils fument, arrêter le tabac ! » prévient le Pr Degano. La nocivité du tabac et celle de l’exposition professionnelle sont additives voire synergiques.

Penser à la BPCO chez l’agriculteur

La BPCO se développe sur un terrain particulier après inhalation au long cours de substances nocives. Chez les fumeurs, les substances pro-oxydantes du tabac favorisent l’inflammation des bronches et la destruction pulmonaire. « Chez les fermiers, les poussières agissent par un mécanisme inflammatoire probablement très différent, créant un épaississement des parois bronchiques et une obstruction bronchique sans destruction pulmonaire », précise le Pr Degano. À l’interrogatoire, les signes d’appel bien que peu sensibles (dyspnée, toux chronique, expectorations) sont à rechercher chez l’agriculteur (qui souvent les banalise). « Il faut savoir évoquer la possibilité d’une BPCO pour ne pas les attribuer à tort au surpoids fréquent (IMC moyen : 27-28), à l’âge avancé, ou au manque paradoxal d’activité physique (piétinement) », explique le pneumologue

Un questionnaire d’aide au dépistage

Pour améliorer le dépistage de la BPCO des fermiers, l’équipe du Pr Degano a développé un questionnaire à partir d’une population majoritairement paysanne. Ce questionnaire publié en 2017 (Guillien et al., Am J Prev Med) inclut pour la première fois la notion d’exposition professionnelle. Sept items sont ainsi cotés en points (pts) : Antécédents de maladie respiratoire ? (non : 0 pts, oui : 72 pts) ; IMC ? (≥ 25 : 0 pts, < 25 : 36 pts) ; Dyspnée ? (non : 0 pts, oui : 41 pts), sexe ? (femme : 0 pts, homme : 36 pts), tabagisme ? (n’a jamais fumé : 0 pts, ancien fumeur : 21 pts, fumeur : 100 pts), âge ? (40-54 ans : 0 pts, 55-64 ans : 11 pts, > 65 ans : 44 pts), exposition professionnelle ? (non : 0 pts, oui : 40 pts). Si le total des points atteint ou dépasse 151 pts, une spirométrie s’impose. Rappelons que le diagnostic de BPCO repose sur la mise en évidence par spirométrie d’un déficit ventilatoire obstructif non réversible ou partiellement réversible au test de réversibilité sous bronchodilatateurs. « Sans spirométrie, pas de diagnostic possible de BPCO ! » invite à retenir le Pr Degano.

Dr Sophie Parienté

Source : Le Quotidien du médecin: 9610