Les enjeux de 2017 en pneumologie

Comment mieux personnaliser la prise en charge ?

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Publié le 13/01/2017
Pr Chabot

Pr Chabot
Crédit photo : DR

Dans de nombreuses affections (cancer, asthme, mucoviscidose, fibrose pulmonaire idiopathique), il est question de médecine personnalisée. En effet, « l’avenir est d’arriver à identifier des sous-groupes de patients pour lesquels les traitements proposés seraient les plus efficaces. L’analyse du « Big Data », notamment des données génétiques, devrait permettre de mieux identifier les patients, en associant ces donnés aux caractéristiques phénotypiques des patients, et d’affiner les choix thérapeutiques », projette le Pr Jean-François Chabot, chef du département de pneumologie au CHU de Nancy.

CBNPC : traiter en fonction des mutations tumorales

Le développement considérable des thérapies ciblées et de l’immunothérapie, dans le cancer bronchique non à petites cellules (CBNPC) localement avancé ou métastatique, a permis une amélioration importante du pronostic chez les patients dont la tumeur présente une mutation de sensibilité (EGFR, ALK, ROS…). Avec l’obtention de nouvelles AMM dans le CBNPC, le choix des molécules adaptées au patient devient cette année une question essentielle. En effet, l’osimertinib est maintenant indiqué chez les patients EGFR mutés résistants aux inhibiteurs des tyrosines kinases (dû à la sélection d’une mutation de résistance) et le ceritinib en cas de résistance au crizotinib. La restauration de l’immunité anti-tumorale par les anticorps inhibant la voie de signalisation médiée par le récepteur PD-1 (nivolumab et pembrolizumab), améliore, avec le nivolumab, le pronostic des patients métastatiques en rechute à une première ligne de chimiothérapie et, avec le pembrolizumab, la survie globale et la survie sans progression en seconde ligne de traitement. L’association des récentes thérapeutiques représente également une future voie d’exploration.

Asthme sévère : des plateformes de concertation médicale

Dans la prise en charge de l’asthme sévère, de nouvelles perspectives se développent grâce aux biothérapies, dont plusieurs sont actuellement sur le point d’être commercialisées. En effet, disposant d’une AMM européenne, le mépolizumab et le reslizumab sont des anticorps monoclonaux anti-IL5 proposés dans l’asthme sévère avec une éosinophilie > 0,4 g/L, permettant une réduction des exacerbations. Le benralizumab, un antirécepteur de l’IL-5, est également en phase de dépôt d’AMM. De plus, des études sont en cours pour évaluer l’efficacité d’autres biothérapies ayant pour cible l’IL-13 et/ou l’IL4, également impliquées dans l’asthme.

La thermoplastie bronchique est une technique d’avenir permettant une amélioration de l’asthme par diminution de l’épaisseur du muscle lisse bronchique sous l’action de la chaleur délivrée en endoscopie. Les résultats obtenus vont conduire à l’ouverture d’un nombre croissant de centres autorisés à proposer ce traitement de l’asthme sévère.

À l’instar des réunions de concertation pluri-disciplinaire en oncologie thoracique utilisant les résultats fournis par les plateformes d’analyse génomique permettant de déterminer les mutations, « l’instauration de réunions collégiales de discussions des dossiers d’asthme sévère est prévue pour définir les stratégies thérapeutiques, notamment concernant les biothérapies, la thermoplastie ou l’inclusion dans des essais thérapeutiques ». L’objectif serait d’améliorer la connaissance du rôle des comorbidités, d’adapter au mieux le traitement en s’assurant d’une bonne observance et de proposer au patient un ensemble d’explorations adaptées à sa situation. A l’avenir, pourraient aussi se discuter les associations de biothérapies.

Fibrose et mucoviscidose : de nouveaux choix thérapeutiques

Dans la fibrose pulmonaire idiopathique, deux molécules, la pirfénidone et le nintedanib, ont prouvé leur efficacité en ralentissant le déclin de la fonction respiratoire. Dans l’année à venir, les discussions multidisciplinaires porteront sur le choix de la molécule adaptée au patient en première intention et, à terme, la séquence d’administration de ces deux molécules, voire leur association.

Dans la mucoviscidose, la mutation Phe508del du gène CFTR est la plus fréquente en France (plus de 40 % des patients). Chez les patients homozygotes Phe508del, l’association d’un correcteur et d’un potentiateur (agissant respectivement sur l’expression membranaire et la fonction canal ionique) du gène CFTR, le lumacaftor et l’ivacaftor, a amélioré le VEMS et diminué la fréquence des exacerbations. S’il est encore trop tôt pour juger sur le long terme (étude sur 24 semaines), le bénéfice observé sur l’état respiratoire des patients est prometteur.

Mieux définir le parcours de soins

Dans une médecine personnalisée, l’amélioration du parcours de soins est essentielle pour le patient et représente, d’un point de vue sociétal, un enjeu majeur pour le système de santé. Ainsi, l’assurance maladie propose à l’issue d’un séjour hospitalier pour une exacerbation de BPCO, des protocoles de retour à domicile (PRADO) afin de limiter le risque de ré-hospitalisations. En effet, il s’agit de mieux structurer le retour à domicile en faisant intervenir systématiquement des professionnels paramédicaux au domicile du patient et en planifiant les visites médicales après le séjour hospitalier. Lors du prochain congrès de pneumologie de langue française (CPLF) prévu fin janvier, le parcours de soins et le lien ville/hôpital seront justement au centre des débats, à travers la gestion des urgences respiratoires.

D’après un entretien avec le Pr Jean-François Chabot, chef du département de pneumologie de l’hôpital de Nancy

Dr Karelle Goutorbe

Source : lequotidiendumedecin.fr