Souvent méconnue et en augmentation

La bérylliose pulmonaire chronique, maladie professionnelle

Publié le 18/10/2011
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Crédit photo : ph

Béryllium

Les propriétés physico-chimiques du béryllium sont cruciales pour les industries de haute technologie. On estime que 12 000 salariés français sont exposés à ce métal. Les plus hautes expositions professionnelles concernent les employés de scierie ou de menuiserie industrielle, les ajusteurs soudeurs, les tuyauteurs, les opérateurs de production des métaux, les professionnels de la bijouterie joaillerie, les prothésistes dentaires et les agents de traitement des déchets (Vincent R, 2011). Mais ces expositions sont le plus souvent méconnues car le béryllium est utilisé dans la composition d’alliage comme ceux de cuivre et d’aluminium. Une contamination environnementale a été rapportée pour des patients habitant à moins de 1,6 km autour d’une industrie utilisatrice de béryllium (Maier et al, 2008).

Physiopathologie

Les particules de béryllium se déposent après inhalation dans les alvéoles pulmonaires. Elles sont phagocytées par les macrophages pour être présentées aux lymphocytes CD4. Ils contribuent avec les macrophages à la formation de granulomes épithélioïdes gigantocellulaires dans le poumon et leur interaction entraîne la production de cytokines inflammatoires et de facteurs de croissance (IFNγ, IL2, TNFα, IL6). L’apoptose des macrophages induite par le béryllium rend plus difficile sa clairance pulmonaire entraînant une amplification et une pérennisation de la réponse inflammatoire (Marchand-Adam et al 2005).

Semblable à la sarcoïdose

L’atteinte pulmonaire de la BPC est la manifestation la plus fréquente mais d’autres organes peuvent être infiltrés par les granulomes comme ce qui est observé au cours de la sarcoïdose. En fait, l’expression clinique, radiologique et histopathologique de la BPC est très semblable à celle de la sarcoïdose et la distinction de ces deux maladies est très difficile. Cela pourrait expliquer que lors de la dernière enquête nationale en 2010, seuls 30 cas de BPC avaient été découverts alors que les estimations faites à partir du nombre de salariés exposés, estiment à environ 250 le nombre de cas de BPC en France (Marchand-Adam et al 2011).

Diagnostic

Seul le test de prolifération lymphocytaire en présence de béryllium (BeLPT) réalisé sur un prélèvement de sang ou de LBA, prouve la réaction immunitaire spécifique vis-à-vis du béryllium au cours de la bérylliose. La présence d’une granulomatose (prouvée par histologie ou fortement suspectée sur un scanner thoracique) associée à un test BeLPT positif confirme le diagnostic de BPC. Le prélèvement pour la réalisation du BeLPT peut être adressé sur rendez-vous dans le service d’immunologie biologique de l’hôpital Henri-Mondor à Créteil (Dr Le Gouvello, 33 (0) 1 49 81 21 11, poste 17 817).

Insuffisance respiratoire

Après l’apparition des premiers symptômes, la plupart des auteurs semblent s’accorder sur l’extrême rareté d’une rémission complète (Marchand-Adam et al 2008). La cause principale de mortalité est l’insuffisance respiratoire chronique irréversible responsable de 81 à 84 % des cas de décès (Marchand-Adam et al 2005). Le retard diagnostique, l’importance de l’exposition au béryllium, la grossesse, l’homozygotie Glu69 semblent assombrir le pronostic. Actuellement, on estime la mortalité de la BPC entre 5 et 38 %.

Corticothérapie

La BPC est reconnue comme maladie professionnelle (Tableau n° 33) et doit être déclarée. Le traitement passe par l’arrêt de l’exposition associé à une corticothérapie systémique. Les doses de corticoïdes nécessaires pour contrôler la bérylliose sont souvent supérieures à celle nécessaires au cours de la sarcoïdose (Marchand-Adam et al 2008).

Références :

Marchand-Adam S, Guillon F, Brauner M, Valeyre D. Rev Mal Respir. 2 005 Apr;22(2 Pt 1):271-87.

Marchand-Adam S, El Khatib A, Guillon F, Brauner MW, Lamberto C, Lepage V, Naccache JM et Valeyre D. Eur Respir J 2008, 32: 687-93.

Marchand-Adam S, Naccache JM, Lazor R, Cottin V, Lhuillier JP, Reynaud-Gaubert M, Gondouin A, Guillaud-Segard B, Valeyre D. Recensement de la bérylliose pulmonaire chronique en France. Rev Mal Respir 2011 28S, A170 (communication orale).

Maier LA, Martyny JW, Liang J, Rossman MD. Recent chronic beryllium disease in residents surrounding a beryllium facility. Am J Respir Crit Care Med. 2008 177, 1002-11.

Vincent R. Exposition professionnelle au béryllium en France. Congrès de la SPLF, Lille 2011 (communication orale).

Dr SYLVAIN MARCHAND-ADAM Maitre de Conférence-Praticien Hospitalier, service de pneumologie, CHRU de Tours.

Source : Le Quotidien du Médecin: 9027