Stabilisation de la fonction pulmonaire

Le sirolimus testé contre la lymphangioléiomyomatose

Publié le 28/04/2011
Article réservé aux abonnés

LA LAM est une maladie systémique rare associée à une destruction kystique du poumon, une pleurésie chyleuse et des tumeurs abdominales comme l’angiomyolipome rénal. Elle touche presque exclusivement les femmes et survient de façon sporadique, touchant environ 5 personnes sur 1 million. Elle se rencontre également chez 30 à 40 % des femmes qui ont une sclérose tubéreuse de Bourneville (TSC pour Tuberous Sclerosis Complex). La fonction pulmonaire, mesurée par le VEMS, décline d’environ 75 à 118 ml par an. Au bout de dix années d’évolution, la plupart des patients ont une insuffisance respiratoire importante, des pneumothorax récidivants et une hypoxémie.

Néoplasie métastatique de bas grade ?

Les cellules musculaires lisses qui infiltrent le poumon sont histologiquement bénignes ; elles proviennent d’une source inconnue, circulent dans le sang et présentent des mutations inactivantes bialléliques du gène TSC. La perte de fonction de TSC active le système de signal mTOR (mammalian Target Of Rapamycin), lequel régule de multiples fonctions cellulaires, notamment la croissance, la motilité et la survie.

Les cellules LAM expriment aussi deux facteurs de croissance lymphangiogéniques : le Vascular Endothelial Growth Factor C (VEGF-C) et le Vascular Endothelial Growth Factor D (VEGF-D).

Un certain nombre d’arguments, y compris la récurrence de la LAM après transplantation pulmonaire, suggèrent que la LAM est une néoplasie métastatique de bas grade qui cible sélectivement les poumons.

On sait que le sirolimus (rapamycine) bloque l’activation de mTOR et restaure l’homéostasie dans les cellules qui ont un gène TSC défectueux. De récents essais de phase I-II avec le sirolimus chez des patients ayant une TSC ou une LAM ont montré une réduction de la taille des angiomyolipomes et, dans quelques cas, une amélioration de la fonction pulmonaire. Toutefois, les risques et les bénéfices du sirolimus dans la LAM sont mal connus. Ce qui a conduit Francis McCormack et coll. à mettre en place une étude internationale multicentrique randomisée contre placebo pour tester l’hypothèse selon laquelle un traitement par sirolimus pendant un an pourrait améliorer la fonction pulmonaire des patients atteints de LAM.

Le critère primaire de l’étude était la différence entre les groupes de la vitesse de modification (pente) de VEMS.

Amélioration de la capacité vitale forcée.

La pente a été de - 12 ±2 ml par mois dans le groupe placebo (43) et de 1 ± 2 ml/mois dans le groupe sirolimus. Pendant toute la période d’observation (12 mois), la différence absolue entre les groupes en ce qui concerne la modification du VEMS a été de 153 ml, soit environ 11 % du VEMS moyen à l’inclusion.

Par rapport au groupe placebo, le groupe sirolimus avait à douze mois une amélioration de la capacité vitale forcée, de la capacité fonctionnelle résiduelle, du taux sanguin de VEGF-D et de la qualité de vie. En revanche, il n’y avait pas de différence en ce qui concerne la distance parcourue à la marche en 6 minutes et dans le capacité de diffusion du CO.

Après l’arrêt du sirolimus, on a assisté à une reprise du déclin de la fonction pulmonaire, dont l’évolution est devenue parallèle à celle du groupe placebo. Les effets adverses étaient plus fréquents dans le groupe sirolimus mais la fréquence des événements adverses sérieux n’a pas été significativement différente entre les deux groupes.

« Chez les patients atteints de LAM, le sirolimus stabilise la fonction pulmonaire, réduit le taux sérique de VEGF-D et est associé à une réduction des symptômes et à une amélioration de la qualité de vie. Le traitement par sirolimus peut être utile chez des patients sélectionnés atteints de LAM », concluent les auteurs.

New England Journal of Medicine du 28 avril 2011, pp. 1595-1606.

 Dr EMMANUEL DE VIEL

Source : Le Quotidien du Médecin: 8951