Le RDV du Quotidien : Hypertrophie bénigne de la prostate

Ce qu’il faut expliquer au patient

Publié le 29/10/2012
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Crédit photo : DR

« HISTOLOGIQUEMENT, l’HBP est définie par une hyperplasie stromale (fibromusculaire) et épithéliale (glandulaire) de la zone de transition et périurétrale de la prostate », rappelle le Dr Mezhradi. L’HBP développe deux lobes, droit et gauche, mais parfois elle affecte un troisième lobe, dit médian, qui ne doit pas être ignoré, car il constitue un facteur d’obstruction et d’irritation vésicale et sa prise en charge est souvent spécifique, ajoute-t-il.

Cette affection est, on le sait, très fréquente et de plus en plus avec l’avancée en âge. « La prostate suscite beaucoup de discussions au stammtich des retraités », observe l’urologue marseillais qui a depuis bien longtemps adopté l’Alsace, ses coutumes et sa langue… D’ailleurs, du côté des patients, la première question est « la prostate ça sert à quoi ? ». Pour leur répondre, il faut tenter de sortir du jargon médical en parlant « l’alsacien urologique », explique le Dr Mezhradi qui propose de formuler la réponse ainsi : « la prostate est branchée sur la vessie, traversée par le canal, elle sert à faire des enfants. Elle fabrique le liquide qui nourrit et transporte les spermatozoïdes », sans omettre d’ajouter pour ces hommes souvent anxieux à l’idée d’une intervention : « On peut vivre sans prostate, comme les femmes peuvent vivre sans matrice. »

L’urologue poursuit les explications qu’il fournit à ses patients « prostatiques » : « C’est un organe qui est sous influence hormonale et, comme chez les femmes pour les seins ou la matrice, elle nécessite une surveillance régulière… Avec l’âge, comme les cheveux blanchissent, elle augmente de volume… Elle peut pousser soit vers la vessie, soit vers le rectum. »« Lorsqu’elle augmente de volume on se pose deux questions : est-ce qu’elle bloque le canal ? Et c’est l’interrogatoire et l’échographie qui nous renseignent. Est-ce qu’elle se cancérise ? Et c’est le toucher rectal et le PSA qui nous disent s’il faut aller plus loin en demandant un prélèvement de la prostate, c’est-à-dire une biopsie. »

Tout praticien est amené à donner ces explications à son patient lorsqu’il se présente avec une symptomatologie évocatrice, mais il n’est pas toujours très facile de rendre l’expertise médicale clairement compréhensible pour le malade… Cette présentation en « uroalsacien » vaut exemple… Quelle que soit la région.

L’indispensable TR ?

Côté médecin, que doit-on savoir aujourd’hui de la démarche diagnostique. À la question récurrente : faut-il toujours faire un toucher rectal, le Dr Mezhradi répond sans hésiter oui, car il complète l’examen urologique, qui fait partie de l’examen clinique et qui recherche aussi face à des symptômes urinaires, un phimosis, un kyste de l’épididyme ou une hernie. Le TR permet aussi de détecter une anomalie rectale. En ce qui concerne la prostate, il permet d’évaluer son volume et de repérer un nodule suspect. Comme le rappelle le Dr Mezhradi, 20 % des cancers de la prostate ont un PSA normal et la moitié des nodules sont des adénocarcinomes. Qu’en est-il de la sensibilité de la palpation pour apprécier la consistance de la prostate ? Une étude récente sur un modèle in vitro de prostate élastomère montre que la palpation permet de détecter des anomalies à partir de 4 mm (20 cm3), mais seulement à une profondeur de 5 mm (LA Baumgart et al. Cancer Epidemiol 2 010 ; 34 : 79-84). La palpation de la prostate est donc moins performante que celle des seins, qui permet de repérer des anomalies de 3 mm.

Pour apprécier le volume de la prostate par le TR, le Dr Mezhradi propose quelques moyens mnémotechniques simples :

- si les bords sont palpés avec la pulpe de l’index, c’est une petite prostate ;

- si les bords sont palpés avec deux phalanges, c’est une prostate de taille moyenne ;

- si le praticien ne parvient pas à palper les bords au TR : c’est une grosse prostate.

L’échographie est plus performante que le TR pour évaluer le volume ; mais ne peut en aucun cas renseigner la consistance, précise l’urologue. C’est pourquoi il faut faire cet examen, car un TR anormal impose une biopsie quel que soit le taux de PSA.

Sur le plan symptomatologique, le Dr Mezhradi souligne également la nécessité d’une meilleure évaluation. Il faut en effet savoir que la vessie contribue aussi à l’apparition des symptômes et que des altérations vésicales irréversibles et/ou évolutives peuvent persister pour leur propre compte même après la suppression de l’obstacle.

*Réunion organisée avec le soutien institutionnel des laboratoires Abbott

 Dr MARINE JORAS

Source : Le Quotidien du Médecin: 9182