C’est la rencontre de trois passionnés de leur territoire qui a permis la naissance de ce projet original : faire venir l’exposition du Muséum national d’histoire naturelle (MNHN) « Je mange donc je suis » (qui s’était tenue à Paris jusqu’en juin 2020), en itinérance, en Normandie, en la complétant d’exemples régionaux. Avec deux objectifs principaux : sensibiliser les plus jeunes aux enjeux de l’alimentation et mettre en valeur le patrimoine agricole auprès des Normands et des touristes.
Olivier Leclerc (architecte urbaniste), Anne Brice (ingénieure agroalimentaire) et Jacques Brulhet (vétérinaire, président honoraire de l’Académie d’agriculture de France, ancien vice-président du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux) ont fondé ensemble, en 2018, l’Association de promotion d’un projet alimentaire territorial (Appat), dont l’objectif est de développer une « Maison de l’alimentation » dans le pays de Coutances afin de présenter l’histoire et les filières agricoles et alimentaires locales.
La venue de l’exposition « Je mange, donc je suis » s’est tout naturellement imposée comme une première étape pour sensibiliser toutes les parties prenantes — Territoire, communauté de communes, chambres d’agriculture et des métiers, les filières agricoles, le lycée agricole, etc. Elle se présente en trois parties — « corps et nourriture », « cultures comestibles » et « consommer la nature » — avec à chaque fois un panneau explicatif, un film et un objet. « Cette exposition nous a séduits, elle est très pédagogique, elle présente de manière simple des sujets qui parlent à tout le monde, permet d’interpeller sur les aspects biologiques, culturels et écologiques de notre alimentation », explique Anne Brice. Adapter une exposition plutôt que de l’exporter clé en main : le projet était inédit pour le MNHN… « et les équipes s’y sont régalées », se réjouit-elle.
Redonner ses fonctions à l’alimentation
En six mois, l’exposition made in Normandy était prête. Vaches, pommes, conchyliculture, camemberts et bien d’autres spécialités normandes y ont trouvé leur place, en illustration des sujets abordés. Une convention a été passée avec la ferme-musée du Cotentin, qui a prêté divers objets historiques et c’est l’atelier du centre de réinsertion le Prépont qui a fabriqué le mobilier scénographique. « Tout le monde s’est mobilisé. Le vice-président de Coutances Mer et Bocage a même fait réparer la baratte à beurre de sa grand-tante pour la mettre à disposition », raconte Anne Brice.
À chaque passage, l’exposition, gratuite, est portée par les collectivités. Des navettes de bus sont organisées pour y emmener les scolaires. Deux ans d’itinérance sont prévus. La première édition, qui s’est tenue à Coutances du 19 mars au 30 avril dernier, a été un franc succès, avec la venue de 45 classes et 6 500 visiteurs (sur 9 000 habitants), et une émulation autour d’évènements parallèles : des ateliers culinaires, un marché « Manche terroirs », un ciné-club sur l’agriculture au cinéma de la ville, une « disco soupe » (soupe collective participative) organisée dans un quartier fragile, suivie de la visite de l’exposition, un banquet populaire pour clôturer l'exposition, etc.
« L’accueil a été enthousiaste. Après deux ans de Covid, les enfants ont eu particulièrement plaisir à sortir des écoles, et voir que le MNHN pouvait venir dans leur territoire a été la cerise sur le gâteau, explique Anne Brice. Nous voulons faire de l’éducation à l’alimentation, raconter l’histoire de l’agriculture, expliquer aux enfants pourquoi on en est arrivé là. On n’en parle jamais à l’école et certains n’ont aucune idée de comment les choses poussent, d’où vient le goût, et parfois n’ont même jamais cuisiné. Quant aux médias, ils diffusent essentiellement des informations négatives, sur ce qui est dangereux de manger. »
Les touristes ont aussi été au rendez-vous, qui s’arrêtaient pour découvrir, entre la visite des plages du débarquement et la cathédrale de Coutances, l’histoire du terroir Normand.
Prochaines dates prévues : du 30 août au 7 septembre à Cerisy-la-Salle, du 5 au 28 septembre à Saint-Lô et du 29 septembre au 9 novembre à Bernay.