Le GRIO (Groupe de Recherche et d'Information sur les Ostéoporoses) vient de présenter des recommandations sur le thème « Implants dentaires et bisphosphonates », lors de sa 26e journée scientifique qui s’est tenue à Paris le 18 janvier. En effet, le risque d’ostéonécrose de la mâchoire (ONM) n’est pas nul avec la prescription de bisphosphonates, les données publiées concernant l’incidence des ONM chez les patients atteints de pathologies malignes traitées par biphosphonates (BP) IV se situent entre 0,8 et 12%. Concernant l’ostéoporose et la maladie de Paget, son incidence, mal connue, est estimée à 1 cas sur 100 000 patient-année (lire aussi Le Généraliste n° 2565).
De plus, dans la plupart des cas rapportés l’ostéonécrose fait suite à des extractions dentaires ou autre chirurgie dentaire invasive. « Il était donc préoccupant de constater l’embarras, les interrogations et la réticence des praticiens de la cavité buccale de plus en plus assaillis de demandes de réhabilitation prothétique et implantaire chez des patients sous bisphosphonates », évoque le Dr Blandine Ruhin, chirurgien maxillo-facial et stomatologue (La Pitié-Salpêtrière, Paris), qui a coordonné l’élaboration des nouvelles recommandations. Plus loin même, la spécialiste rapporte que « certains chirurgiens dentistes refusent de pratiquer des soins dentaires chez ces patients, les adressant systématiquement à un service hospitalier de chirurgie maxillo- faciale ». Une précaution pas forcément adaptée à la situation. En effet, il faut savoir qu’en cas de pathologie bénigne (ostéoporose, maladie de Paget) traitée par BP depuis moins de deux ans, le risque d’ONM est très faible. Par conséquent, il n’est pas nécessaire d’avoir recours à une prise en charge hospitalière lorsqu’une pose d’implants est envisagée. Ce qui n’est, en revanche, pas du tout le cas chez les patients traités par bisphosphonates en cancérologie, chez lesquels la pose d’implants est déconseillée
Un bilan dentaire préalable
Les recommandations détaillent plusieurs situations impliquant la collaboration active des médecins et dentiste.
En premier lieu, lorsqu’un patient déjà traité par BP souhaite se faire poser des implants, le médecin doit l’informer des risques associés à l’implantologie et des solutions alternatives. L’évaluation des facteurs de risque sera rigoureuse prenant en compte le type de BP, la dose et la durée du traitement, la présence de facteurs aggravants (maladie parodontale, mauvaise hygiène buccodentaire) ou potentiellement aggravants (sexe féminin, diabète, obésité, tabac…). « Toutes ces informations doivent être tracées dans le dossier médical, et transmises au dentiste », prévient Blandine Ruhin, qui indique par ailleurs qu’il est inutile d’interrompre temporairement les BP.
En deuxième lieu, lorsqu’un patient est candidat à un traitement par BP dans l’indication antiostéoporotique et qu’il a déjà un ou des implants dentaires, le médecin l’informera sur les risques et bénéfices du traitement. De plus, un bilan bucco dentaire complet (avec panorama dentaire) et des soins nécessaires doivent être réalisés avant de démarrer le traitement par BP, avec un suivi dentaire régulier (deux fois par an). Une recommandation trop stricte pour certains : réaliser un bilan dentaire, réputé chronophage, préalablement au traitement retarderait sa mise en place, ce qui ne serait pas judicieux chez un patient à haut risque de fracture.
En troisième lieu, lorsque l’implant est en place mais présente une péri-implantite. Il faudra alors avoir recours à une prescription d’antibiotiques (amoxicilline ou clindamycine), des bains de bouche à la chlorhexidine, voire à une chirurgie la moins traumatisante possible, et à une surveillance prolongée. Plus grave, si une nécrose péri-implantaire sous BP se déclare, il faudra traiter la douleur, l’infection tissulaire et minimiser la progression de la nécrose. Sans amélioration, on procédera au retrait de l’implant avec une prise en charge en service spécialisé.
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