Le comité de pharmacovigilance de l’Agence européenne du médicament, le PRAC (Pharmacovigilance Risk Assessment Committee), vient de publier des recommandations de restriction – drastiques - d’usage des fluoroquinolones et des quinolones.
Cette conclusion fait suite à une analyse d'entretiens avec des patients, des professionnels de santé et des sociétés savantes réalisées en juin 2018 sur les effets indésirables, parfois à long terme, de ces antibiotiques.
Le PRAC souligne que certains malades traités par fluoroquinolones ou quinolones (par voie orale, parentérale ou par inhalation) rapportent des effets indésirables invalidants et persistants sur le long terme de type musculaires, tendineux, osseux ou affectant le système nerveux. Cette instance de pharmacovigilance européenne recommande même le retrait de certaines molécules qui « restent autorisées pour des indications qui ne devraient plus l’être. »
Cet avis du PRAC était attendu, puisque qu’en février 2017 l'Agence européenne du médicaments démarrait une procédure d’arbitrage sur ces antibiotiques.
Des prescriptions contrôlées
Ainsi selon le PRAC, les infections bénignes, pouvant régresser spontanément (telles les infections oropharyngées) ne doivent plus recevoir de fluoroquinolones. De même la prévention des diarrhées du voyageur ou la prévention des cystites récidivantes ne sont pas des indications, pas plus que les infections modérément sévères pouvant relever d’autres antibiotiques. Et bien entendu, les patients ayant déjà présenté des symptômes avec une quinolone ou une fluoroquinolone ne doivent plus en recevoir.
En l’absence d’alternative, le PRAC rappelle que ces antibiotiques doivent être utilisés avec précaution chez les sujets particulièrement à risque de complication tendineuse. À savoir, les malades âgés, les porteurs de pathologies rénales, de transplantés, ou encore ceux sous corticothérapie.
Des patients informés
Tout patient traité doit être pour le moins informé du risque d’effet indésirable et de la nécessité d’interrompre le traitement dès les premiers signes musculaires, tendineux ou osseux (inflammation ou déchirure tendineuse, douleur ou faiblesse musculaire, douleur ou épanchement articulaire) ou signe d’atteinte du système nerveux (paresthésies, athénie, dépression, confusion, idées suicidaires, troubles du sommeil, visuels ou auditifs, troubles de l’odorat ou du goût).
Les fluoroquinolones concernées par cet avis du PRAC sont la ciprofloxacine, la flumequine, la levofloxacine, la lomefloxacin, la moxifloxacine, la norfloxacine, l’ofloxacine, la pefloxacine, la prulifloxacine et la rufloxacine. Côté quinolones, il s’agit de la cinoxacine, l’acide nalidixique et l’acide pipemidique.
Cette recommandation est désormais entre les mains du CHMP (Committee for Medicinal Products for Human Use), juste avant la décision finale de l’EMA.
Aux Etats Unis, la FDA a conduit une revue de ces effets chez les patients traités par fluoroquinolone par voie systémique dès mai 2016, ce qui a entraîné une restriction de l’utilisation de ces produits dans des infections moins sévères (sinusite aiguë, bronchite aiguë, infection urinaire non compliquée). Une approche similaire a récemment été suivie par Santé Canada.
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